Document de principes
Affichage : le 23 septembre 2022
Leonora Hendson, Paige T. Church, Rudaina Banihani; Société canadienne de pédiatrie, Comité d’étude du fœtus et du nouveau-né
Paediatr Child Health 2022 27(6):365–371.
La survie des extrêmes prématurés (moins de 28 semaines d’âge gestationnel) s’est améliorée au fil du temps. Bon nombre s’en sortent bien et ont une bonne qualité de vie. Ils demeurent toutefois vulnérables à des problèmes de santé, y compris des difficultés neurosensorielles et neurodéveloppementales, que les médecins de première ligne, les pédiatres et les cliniques spécialisées doivent surveiller. Le présent document de principes passe en revue les conséquences médicales et neurodéveloppementales potentielles pour les extrêmes prématurés dans les deux ans suivant leur congé et fournit des stratégies de counseling, de dépistage précoce et d’intervention. Parce qu’ils sont tous liés à l’extrême prématurité, la dysplasie bronchopulmonaire ou les troubles respiratoires, les problèmes d’alimentation et de croissance, le développement neurosensoriel (vision et audition), la paralysie cérébrale et le trouble du spectre de l’autisme doivent faire rapidement l’objet d’une évaluation. Pour évaluer la croissance et le développement, il faut corriger l’âge chronologique en fonction de l’âge gestationnel jusqu’à 36 mois de vie. Par ailleurs, l’attention au bien-être émotionnel des parents et des proches fait partie intégrante des soins de qualité de l’extrême prématuré.
Mots-clés : extrême prématuré; développement neurosensoriel; issues neurodéveloppementales; paralysie cérébrale; trouble du spectre de l’autisme
Les progrès en soins néonatals des dernières années ont considérablement accru la survie des nouveau-nés à de plus jeunes âges gestationnels (AG) [1]. Au Canada, la survie des extrêmes prématurés (EP) qui reçoivent des soins actifs et sont admis dans un établissement du Réseau néonatal canadien s’élève à 40 % à 22 semaines d’AG, à 50 % à 23 semaines d’AG, à 73 % à 24 semaines d’AG, à 82 % à 25 semaines d’AG, à 90 % à 26 semaines d’AG, à 93 % à 27 semaines d’AG et à 95 % à 28 semaines d’AG [2].
Les EP vivent des complications médicales uniques en soins intensifs néonatals. D’après les données canadiennes, 81 % de ceux venus au monde à 24 semaines d’AG ou moins, 77 % à 25 semaines d’AG, 70 % à 26 semaines d’AG, 53 % à 27 semaines d’AG et 41 % à 28 semaines d’AG présentent une morbidité néonatale majeure, y compris l’une des affections suivantes : la dysplasie bronchopulmonaire, la rétinopathie du prématuré marquée, les lésions neurologiques, l’entérocolite nécrosante de stade 2 ou 3 ou le sepsis d’apparition tardive [2]. Par ailleurs, 39 % des EP nés à moins de 25 semaines d’AG, 23 % de ceux nés entre 25 et 26 semaines d’AG et 11 % de ceux nés entre 27 et 28 semaines sont sous oxygène lorsqu’ils obtiennent leur congé. De plus, 1 % de tous ces nouveau-nés ont une sonde de trachéostomie et 6 % de ceux nés à moins de 25 semaines d’AG et 2 % de ceux nés entre 25 et 28 semaines d’AG ont une sonde de gastrostomie au moment de leur congé [2].
Le Réseau canadien de suivi néonatal est une collaboration de programmes néonatals et périnatals qui, en liaison avec le Réseau néonatal canadien, suit les nourrissons nés à moins de 29 semaines d’AG et les évalue à 21 mois d’âge corrigé (AC). Dans l’ensemble, 17 % de ces nourrissons présentent une déficience neurodéveloppementale (DND) importante et 28,7 %, une DND légère à modérée (tableau 1) [3][4]. L’AG, le sexe, la naissance hors d’un centre de soins tertiaires, la gravité de la maladie, la dysplasie bronchopulmonaire, l’entérocolite nécrosante, le sepsis d’apparition tardive, la rétinopathie du prématuré, les lésions neurologiques et le lieu (l’emplacement de l’unité de soins intensifs néonatals de niveau III) avaient un lien significatif avec la DND [4].
Le présent document de principes fait ressortir des aspects essentiels des soins aux EP survivants jusqu’à deux ans d’AC. Même si l’EP désigne un nouveau-né de moins de 28 semaines d’AG, les données du Réseau néonatal canadien et du Réseau canadien de suivi néonatal incluent les prématurés nés à 28 semaines, de même que l’information à leur sujet.
En 2004, un cadre destiné aux cliniques de suivi en soins tertiaires a défini les évaluations optimales des nourrissons à haut risque et les lacunes en matière de connaissances et a priorisé les efforts de recherche [6]. Au Canada, les catégories de nourrissons, le moment des rendez-vous, les protocoles d’évaluation standardisés et le rôle des pédiatres communautaires et des pédiatres du développement au sein des programmes de suivi néonatal et périnatal sont également établis depuis un certain temps [7]. La plupart des cliniques de suivi néonatal et périnatal canadiennes sont composées d’équipes interprofessionnelles qui suivent des enfants nés à moins de 29 semaines d’AG [4] et fournissent une surveillance et un soutien du développement améliorés. Les équipes peuvent être formées d’un néonatologiste, d’un pédiatre ou d’un pédiatre du développement; d’une infirmière ou d’une infirmière praticienne; d’un ergothérapeute, d’un physiothérapeute et d’un orthophoniste; d’un psychologue scolaire ou clinique et d’un psychométricien; d’un diététiste et d’un travailleur social; d’un orthoptiste, d’un ophtalmologiste et d’un audiologiste. Ensemble, ces équipes fournissent une évaluation longitudinale, un dépistage et un traitement précoces, une orientation vers des ressources locales et une assurance qualité. Il est essentiel de compter sur la collaboration et la coordination des soins entre les médecins de première ligne, les pédiatres et les services spécialisés à des points précis dans le temps pour éviter les lacunes en matière de soins et le dédoublement des services et pour garantir l’orientation précoce vers des services spécialisés et des services de réadaptation, de même que l’accès à un soutien financier et à des ressources communautaires [8]-[39] (liste offerte en supplément).
L’AC, qui désigne l’âge chronologique déduction faite du nombre de semaines entre la naissance et 40 semaines d’AG, est la mesure recommandée avant l’âge de trois ans [40] chez les nourrissons nés avant 37 semaines d’AG pour évaluer la croissance, le développement et le fonctionnement respiratoire [41]. En raison de la maturation tardive du cerveau du prématuré, les nourrissons nés avant terme obtiennent des scores réduits lorsque les mesures sont prises d’après leur âge chronologique; cette réduction est particulièrement apparente avant l’âge de trois ans et chez les nourrissons qui sont nés à un AG peu avancé [42][43]. Dans le présent document de principes, les références d’âge désignent l’AC, à moins d’une indication à l’effet contraire.
Une récente étude a révélé que 20 % des nourrissons canadiens nés à 28 semaines d’AG ou moins avaient besoin d’une technologie d’assistance à la maison, y compris de l’oxygène (16 %), une alimentation par gavage (4 %), une gastrostomie ou une jéjunostomie (4 %), une ventilation non invasive (0,9 %), une iléostomie ou une colostomie (0,8 %) et une trachéostomie (0,6 %) [44]. Ces nourrissons avaient également un AG moins avancé et un poids moins élevé à la naissance et étaient plus susceptibles de présenter une dysplasie bronchopulmonaire, un sepsis d’apparition tardive ou une entérocolite nécrosante devant être opérée. Par ailleurs, la réhospitalisation après le congé et jusqu’à 18 mois d’AC s’élevait à 60 % chez les nourrissons ayant des besoins médicaux complexes et à 29 % chez ceux qui n’en avaient pas. Les problèmes d’ordre respiratoire ou chirurgical étaient les principales raisons d’une telle réhospitalisation [44].
Le recours à des médicaments sur ordonnance était courant chez les nourrissons ayant des besoins médicaux complexes par rapport à ceux qui n’en avaient pas, y compris les stéroïdes inhalés ou les bronchodilatateurs (32 % par rapport à 16 %), les antibiotiques (20 % par rapport à 14 %), les médicaments contre le reflux (20 % par rapport à 4 %), les diurétiques (6 % par rapport à 1 %) et les anticonvulsivants (3 % par rapport à 1 %) [44]. Presque tous ces nourrissons avaient besoin de services ambulatoires (physiatrie, soins infirmiers à domicile, diététique, physiothérapie, ergothérapie, orthophonie, services de réadaptation) [44]. Le risque de DND était deux fois plus élevé (rapport de cotes de 2,0, intervalle de confiance à 95 %, 1,7 à 2,5) et celui de DND importante, presque trois fois plus élevé (rapport de cotes de 2,8, intervalle de confiance à 95 %, 2,2 à 3,6) chez les nourrissons qui avaient des besoins médicaux complexes [44].
La nutrition est un élément déterminant de la survie néonatale, de la croissance et du développement neurologique des EP. Au congé, les programmes de nutrition sont personnalisés d’après les besoins de chaque nourrisson. Le lait maternel est favorisé, sous forme d’allaitement exclusif direct lorsque la mère le peut et le souhaite, ou de lait maternel exprimé [17]. Il faut promouvoir l’allaitement et l’expression du lait maternel avant l’admission en soins intensifs néonatals, dans la mesure du possible, et continuer de le faire après le congé pour que le nouveau-né en tire des avantages à court terme (p. ex., défense de l’hôte, développement gastro-intestinal, tolérance à l’alimentation, nutrition optimale, réduction du risque d’entérocolite nécrosante et de rétinopathie du prématuré) et à long terme (taux d’obésité plus bas, meilleure tension artérielle, insulinorésistance réduite, meilleures issues neurodéveloppementales) et pour assurer la santé de la mère à un coût minime pour les familles [17]. Chez les EP, notamment s’ils ont des antécédents de retard de croissance et des problèmes médicaux sous-jacents, il peut être nécessaire de prévoir une préparation commerciale pour prématuré après le congé afin d’accroître l’apport en protéines et en énergie [12][13]. Les taux les plus élevés de croissance de rattrapage et de minéralisation osseuse sont atteints dans les premiers mois suivant le congé [12][13], mais il n’y a pas de consensus sur la durée du maintien des préparations commerciales après le congé.
Il convient d’évaluer la croissance, l’ingestion alimentaire et la qualité de l’alimentation au congé, puis d’assurer une surveillance étroite au moment prévu du terme et toutes les deux à quatre semaines après le congé, et ce, jusqu’à l’obtention d’une courbe de croissance appropriée [12][13]. La courbe de croissance de Fenton pour les nourrissons prématurés peut être utilisée peu après le congé [10]. Par la suite, la surveillance de la croissance est mesurée au moyen des normes de croissance de l’Organisation mondiale de la Santé [11]. Les nourrissons qui sont surtout allaités (plus de 50 % de l’ingestion alimentaire), les nourrissons ayant des affections persistantes et ceux qui ont récemment adopté un autre type ou un autre mode d’alimentation doivent faire l’objet d’un suivi étroit [12][13]. Les parents devraient avoir accès à des services diététiques ou à des conseils en lactation, selon les besoins.
Des suppléments de fer sont nécessaires pour prévenir ou traiter l’anémie de la prématurité. Les nourrissons qui sont principalement allaités devraient recevoir des suppléments de fer contenant de 2 mg/kg/jour à 3 mg/kg/jour de fer élémentaire pendant la première année [19]. Ceux qui reçoivent principalement des préparations commerciales n’auront peut-être pas besoin de suppléments de fer si la préparation est riche en fer. Les préparations commerciales procurent de 2 mg/kg/jour à 3 mg/kg/jour de fer élémentaire (les préparations lactées classiques conçues pour les nouveau-nés prématurés en contiennent de 10 mg/L à 14 mg/L) [19].
Les EP sont très vulnérables à une maladie osseuse métabolique de la prématurité, pour laquelle ils devront recevoir des suppléments en soins intensifs néonatals [45][46]. Les nourrissons qui sont exclusivement ou partiellement allaités ou qui reçoivent des préparations commerciales devraient se faire administrer au moins 400 UI/jour de vitamine D, et jusqu’à 800 UI/jour s’ils sont considérés comme à haut risque (pigmentation cutanée foncée ou résidence dans une communauté du Grand Nord) [20].
Les troubles pédiatriques de l’alimentation (lorsque l’ingestion orale est inappropriée par rapport à l’âge et associée à un dysfonctionnement des habiletés alimentaires ou d’ordre médical, nutritionnel ou psychosocial) sont courants chez les EP. Ils peuvent être causés ou compliqués par une dysplasie bronchopulmonaire, une paralysie des cordes vocales, des lésions neurologiques ou des expériences alimentaires négatives [47]. L’alimentation est un acquis physiologique et comportemental continu complexe, et les habiletés alimentaires continuent de se développer après le congé des soins intensifs néonatals. Le cadre de la Classification internationale du fonctionnement, du handicap et de la santé de l’Organisation mondiale de la Santé aborde quatre secteurs de l’alimentation (des habiletés alimentaires ou d’ordre médical, nutritionnel ou psychosocial) pour mieux définir les besoins des patients et des familles. Des cliniques spécialisées et des services de réadaptation appropriés peuvent être nécessaires pour prendre en charge et soutenir la relation entre le parent et le nourrisson [47][48].
Les DND marquées sont plus fréquentes chez les EP (tableau 1) [3][4]. Les problèmes de régulation émotionnelle et comportementale et les retards cognitifs, moteurs et langagiers, dont les taux s’accentuent à mesure que l’AG diminue, sont toutefois beaucoup plus courants [3].
Au cœur de la présentation neurodéveloppementale de l’EP se trouvent des variations aux éléments essentiels du développement du cerveau, découlant du stress de la transition et du milieu extra-utérin. Malgré les tentatives pour optimiser l’environnement et limiter le risque de lésions, le développement du cerveau de l’EP continue d’être caractérisé par une dysmaturation. Les phénotypes comportementaux reflètent les forces et les difficultés cognitives, motrices et sociales observées dans une population qui partage une déficience biologique. Le phénotype comportemental de l’EP qui devient nourrisson, puis tout-petit, est caractérisé par l’immaturité socioaffective, la labilité, le comportement « actif », les difficultés langagières et un développement moteur atypique et tardif [49]. Il faut envisager un retard de développement global (d’au moins de deux écarts-types sous la moyenne) dans au moins deux domaines (motricité, langage, cognition, relations sociales et personnelles, activités de la vie quotidienne) chez les EP. Il est important de poser un diagnostic précoce pour amorcer un traitement de soutien en réadaptation et des services communautaires [27].
La paralysie cérébrale (PC) est une incapacité physique courante à la présentation hétérogène caractérisée par des déficiences du fonctionnement moteur qui limitent l’activité. Elle est causée par une perturbation du cerveau en développement du fœtus ou du nourrisson [22]. Les nourrissons prématurés sont plus vulnérables à une PC, qui est habituellement associée à une grave hémorragie intraventriculaire ou à une lésion périventriculaire de la substance blanche [23][26]. À 21 mois d’AC, la PC est confirmée chez 6,2 % des enfants nés à 28 semaines d’AG ou moins [3], et le risque augmente à mesure que l’AG diminue. En effet, le diagnostic touche 14,8 % des prématurés à 23 semaines d’AG, 10,2 % à 24 semaines d’AG, 7,2 % à 25 semaines d’AG, 5,6 % à 26 semaines d’AG et 4,8 % à 27 et 28 semaines d’AG [3]. Ces taux se comparent à une incidence de PC de 0,2 % à 0,3 % dans la population générale du Canada [23].
Les premiers signes de PC incluent la préférence pour une main, la raideur des jambes, l’incapacité de s’asseoir à l’âge de neuf mois, le maintien des poings fermés après l’âge de quatre mois ou les délais ou l’asymétrie des mouvements [23]. Le diagnostic avant six mois d’AC est exact lorsqu’il est appuyé par une neuro-imagerie et des évaluations neurologiques standardisées effectuées en clinique de suivi néonatal et périnatal [24]. Le diagnostic rapide est important, car on sait que des interventions précoces (telles que la thérapie par le mouvement induit par la contrainte) et le dépistage rapide de déficiences connexes (telles que la surveillance des hanches) améliorent les issues fonctionnelles et favorisent le bien-être des parents et des proches [24][25]. Les ressources recommandées sont souvent accessibles dans les localités par l’entremise des cliniques de PC néonatales et périnatales interprofessionnelles et de PC spécialisées.
Le trouble du spectre de l’autisme (TSA) se caractérise par une déficience de la communication sociale, des intérêts restreints et des profils de comportement répétitifs. La prévalence de TSA est quatre fois plus élevée chez les EP que chez les enfants à terme [50][51]. Comme dans le cas de la PC, le risque de TSA augmente à mesure que l’AG diminue, c’est-à-dire qu’il est estimé à 15,0 % entre 23 et 24 semaines d’AG, à 6,5 % de 25 à 26 semaines d’AG et à 3,4 % à 27 semaines d’AG [51].
Les symptômes comportementaux précoces (retard de langage, absence de réponse à son nom, contact visuel limité, jeux répétitifs ou inhabituels) peuvent être indicateurs d’un risque de TSA [28]. Les enfants peuvent obtenir un diagnostic de TSA avant l’âge de deux ans (28), mais il est difficile de dépister ce trouble chez l’EP parce que les déficiences sensorimotrices et cognitives et la dysrégulation affective et comportementale liées à la prématurité peuvent fausser le diagnostic [52] ou s’y associer.
Trois stratégies sont recommandées pour poser le diagnostic : s’appuyer sur un seul pédiatre formé et expérimenté, adopter un modèle de partage des soins ou privilégier une approche d’équipe [53]. Pour l’EP ayant un TSA, les cliniques de suivi néonatal et périnatal devraient donner accès à une évaluation spécialisée ou à une orientation vers des spécialistes (p. ex., en psychologie) ou être en mesure d’utiliser des outils diagnostiques. Les cliniques de suivi néonatal et périnatal peuvent contribuer à établir un diagnostic définitif, à dépister les affections connexes et à déterminer le degré global de fonctionnement adaptatif de l’enfant. Les interventions pour les tout-petits incluent des approches comportementales et développementales avec l’appui de thérapeutes, de professionnels de la santé mentale et de dispensateurs de services communautaires [54].
Les déficiences visuelles qui découlent des séquelles d’une rétinopathie du prématuré marquée ou, à moindre fréquence, ont une origine cérébrale, sont des issues importantes, mais tout de même peu fréquentes chez l’EP (tableau 1) [3][32][33]. L’EP devrait être soumis à une évaluation ophtalmologique régulière d’erreurs de réfraction, d’amblyopie et de strabisme [32]. Il peut également être touché par des déficiences auditives (tableau 1) [3]. La prévalence de dyssynchronie neuropathique est plus élevée chez l’EP, et cette affection exige des protocoles particuliers de dépistage auditif du nouveau-né. L’EP a besoin d’évaluations auditives récurrentes pour s’assurer de dépister une perte auditive d’apparition tardive ou progressive [34][35].
Les améliorations à court terme découlant d’une intervention précoce sont attribuables à la plasticité du cerveau en développement, qui est hautement adaptatif et qui répond à la stimulation environnementale [21]. Une telle réactivité favorise des interventions précoces positives.
Le cerveau en développement est également vulnérable à des stimulations négatives, y compris le stress, l’inflammation, la douleur et la malnutrition. Des événements préjudiciables peuvent avoir de multiples trajectoires développementales en fonction du moment, de la nature et du mode de rétablissement. Une lésion grave, si elle est étendue, peut être impossible à guérir. Des lésions légères à modérées peuvent avoir des effets minimes et être suivies d’un rétablissement observable, mais il arrive qu’une rechute suive un rétablissement apparent (c’est l’« effet de dormance »). Dans ce cas, l’atteinte se révèle dans toute son ampleur seulement lorsque la zone touchée devient importante sur le plan du développement [49]. En raison de ce délai, une intervention précoce peut avoir une efficacité limitée à long terme et agir davantage sur le fonctionnement que sur le diagnostic. Par exemple, une intervention précoce ne modifie pas le diagnostic de PC, mais un traitement rapide a un effet positif démontré sur le fonctionnement de l’enfant touché [23][25]. Des données probantes solides démontrent que le dépistage et une intervention précoces ont des conséquences positives pour les enfants qui vivent avec un TSA [54].
Il convient de placer le bien-être des parents et des proches au cœur des soins de qualité. Les taux de dépression postnatale, d’état de stress post-traumatique et d’anxiété sont considérablement plus élevés chez les parents d’enfants prématurés - on estime qu’ils se situent entre 30 % et 60 % [8][9]. Le parent est le premier régulateur du nourrisson : il établit le rythme des boires et du sommeil, renforce l’attachement et établit les relations et les comportements familiaux essentiels au sain développement de l’enfant. Il faut envisager d’évaluer la santé mentale du parent dont le nourrisson est en soins intensifs néonatals [8][9]. Des outils de dépistage comme l’échelle de dépression postnatale d’Édimbourg sont accessibles en ligne, et on peut également orienter le parent vers un programme local en santé mentale périnatale. Les médecins et autres professionnels de la santé peuvent s’investir auprès des familles qu’ils suivent et établir une relation avec elles. Pour ce faire, ils peuvent évaluer et soutenir le début des relations à la maison et orienter les familles d’EP vers des ressources communautaires et des services de soutien.
Le comité de nutrition et de gastroentérologie et le comité de la pédiatrie communautaire de la Société canadienne de pédiatrie ont révisé le présent document de principes, de même que le comité directeur de la section de la médecine néonatale et périnatale de la Société canadienne de pédiatrie et la Fondation pour bébés prématurés canadiens.
COMITÉ D’ÉTUDE DU FŒTUS ET DU NOUVEAU-NÉ DE LA SOCIÉTÉ CANADIENNE DE PÉDIATRIE (2020-2021)
Membres : Gabriel Altit MD, Nicole Anderson MD (membre résidente), Heidi Budden MD (représentante du conseil), Leonora Hendson MD (ancienne membre), Souvik Mitra MD, Michael R. Narvey MD (président), Eugene Ng MD, Nicole Radziminski MD, Vibhuti Shah MD (ancien membre)
Représentants : Radha Chari MD (La Société des obstétriciens et gynécologues du Canada), James Cummings MD (comité d’étude du fœtus et du nouveau-né, American Academy of Pediatrics), William Ehman MD (Le Collège des médecins de famille du Canada), Danica Hamilton inf. (Association canadienne des infirmières et infirmiers en néonatologie), Chloë Joynt MD (comité directeur de la section de la médecine néonatale et périnatale de la SCP), Chantal Nelson Ph. D. (Agence de la santé publique du Canada)
Auteures principales : Leonora Hendson MD, Paige T. Church MD, Rudaina Banihani MD
Avertissement : Les recommandations du présent document de principes ne constituent pas une démarche ou un mode de traitement exclusif. Des variations tenant compte de la situation du patient peuvent se révéler pertinentes. Les adresses Internet sont à jour au moment de la publication.
Mise à jour : le 8 février 2024