Document de principes
Affichage : le 24 octobre 2018 | Reconduit : le 11 janvier 2024
Brenda Clark, Stacey A. Bélanger; Société canadienne de pédiatrie, Comité de la santé mentale et des troubles du développement
Paediatr Child Health 2018, 23(7):491–497.
Le trouble de déficit de l’attention/hyperactivité (TDAH) est un trouble neurodéveloppemental chronique. La Société canadienne de pédiatrie a préparé trois documents de principes après avoir effectué des analyses bibliographiques systématiques. Leurs objectifs s’établissent comme suit :
1) Résumer les données probantes cliniques à jour sur le TDAH.
2) Établir une norme pour les soins du TDAH.
3) Aider les cliniciens canadiens à prendre des décisions éclairées et fondées sur des données probantes pour rehausser la qualité des soins aux enfants et aux adolescents qui présentent cette affection.
Les sujets abordés dans la partie 3, qui porte sur l’association avec le trouble du spectre de l’autisme (TSA), le handicap intellectuel (HI) et la prématurité, incluent les difficultés liées à l’évaluation diagnostique, les présentations courantes, le rôle de la génétique et le traitement, y compris les avantages de l’activité physique. Les recommandations reposent sur les lignes directrices à jour, les données probantes tirées des publications scientifiques et le consensus d’experts.
Mots-clés : Autism; ADHD; Intellectual disability; Prematurity
GUIDE POUR LES CLINICIENS : Les interventions non pharmacologiques
Les déficits neurodéveloppementaux associés au trouble du spectre de l’autisme (TSA), au handicap intellectuel (HI) ou à la prématurité imitent et recoupent les symptômes de TDAH qui touchent l’apprentissage, le comportement et le fonctionnement quotidien. Cependant, les symptômes de TDAH peuvent également éclipser ou masquer les symptômes de ces trois affections et retarder le diagnostic. Il faut posséder des compétences dans l’évaluation du TSA, du HI et des séquelles de la prématurité, de même que des comorbidités connexes, et privilégier une approche multidisciplinaire qui intègre des interventions en matière d’environnement, de comportement et d’apprentissage pour les patients ayant ces affections. Le présent document de principes met en lumière les symptômes initiaux et les trajectoires d’atteintes de ces trois affections distinctes, mais convergentes, afin d’améliorer les connaissances et d’orienter le plan de traitement. Le rôle de la génétique et des traitements (pharmacologiques et non pharmacologiques) est également abordé.
Contrairement au DSM-IV-TR, la cinquième édition du Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux (DSM-5) indique que le TSA et le TDAH ne sont pas des affections mutuellement exclusives, mais qu’elles coexistent souvent chez la même personne [1]. Le traitement du TSA est axé sur les déficits de la socialisation et des compétences relationnelles, les comportements répétitifs et stéréotypés et les intérêts restreints, qui en sont des caractéristiques fondamentales [1]. Cependant, des données probantes plus récentes et croissantes sur la comorbidité avec des troubles neurodéveloppementaux qui se manifestent pendant l’enfance, comme le TDAH, et qui ont des retombées particulières sur le fonctionnement et le pronostic des enfants et des adolescents ayant un TSA, ont élargi la portée du traitement [2]–[4]. La comorbidité entre le TSA et le TDAH est élevée. Plus de 50 % des personnes qui ont un TSA répondent aux critères du TDAH, et jusqu’à 50 % des enfants ayant un TDAH ont des traits de TSA [3]–[7].
Même si le TDAH et le TSA possèdent chacun des symptômes fondamentaux distincts, les enfants ayant un TSA peuvent présenter de l’inattention, de l’impulsivité et de l’hyperactivité, et les enfants ayant un TDAH présentent souvent des déficits sociaux évocateurs du TSA [4]–[6]. Les deux affections se manifestent tôt, sont plus fréquentes chez les garçons, ont une forte composante héréditaire et s’associent à d’autres troubles psychiatriques, développementaux et neurologiques [4][7][8]. Les jeunes enfants ayant un TSA associé au TDAH reçoivent souvent leur diagnostic de TDAH d’abord. Il est alors fort probable que leur diagnostic de TSA soit considérablement retardé (d’une période moyenne de trois ans) par rapport à ceux qui reçoivent un diagnostic de TSA associé au TDAH ou de TSA seul [9].
Les enfants ayant un TSA associé au TDAH ont plus d’atteintes de la fonction cognitive, des troubles du comportement plus importants et des psychopathologies plus marquées que ceux qui ont l’une ou l’autre de ces affections [4][8]-[12]. Ces atteintes incluent des symptômes autistiques plus graves et plus prononcés, de plus grandes difficultés sur le plan de la socialisation et de la communication, des soins personnels, des facultés adaptatives et de la fonction exécutive, ainsi que des comportements internalisés problématiques (tels que l’anxiété et la dépression). Les comportements perturbateurs maladaptés (p. ex., crises de colère, agressions, dysrégulation émotionnelle) et les comportements stéréotypés ou répétitifs sont plus courants chez les enfants ayant un TSA associé au TDAH [4][8]-[12]. Les troubles psychiatriques comorbides (p. ex., schizophrénie, bipolarité, dépression, anxiété, comportements perturbateurs, troubles du sommeil et tics) sont également plus fréquents. Le TSA associé au TDAH est lié à des troubles d’apprentissage importants et à des atteintes spécifiques du langage, particulièrement chez les enfants et les adolescents ayant un TSA de plus haut niveau [2]-[4][8]-[12].
Le TSA partage des facteurs génétiques avec le TDAH [8][9]. De rares variantes du nombre de copies (VNC) (qui touchent moins de 1 % de la population), des délétions et des duplications chromosomiques qui ont une ampleur de l’effet plus importante sont fréquentes chez les enfants ayant un TDAH; il y a un recoupement important entre ces altérations et les anomalies génétiques observées dans les cas de TSA et de HI [8][12]-[14]. Le syndrome de l’X fragile, la sclérose tubéreuse, la délétion 22q11 et le syndrome de Williams sont tous des syndromes génétiques combinant des caractéristiques cliniques du TSA associé au TDAH [8][12]-[14].
Les loci du TSA associé au TDAH ont été localisés sur les chromosomes 12, 16 et 18 [11]–[13]. Seize polymorphismes nucléotidiques simples (PNS) associés au TSA sont ressortis d’études sur le TDAH, et 25 PNS semblent liés au TDAH d’après des études sur le TSA [13]. Ces études laissent croire à des caractéristiques héréditaires communes au TSA et au TDAH [8][13][14]. Les recherches traitant du rôle de la génétique sur le TSA évoluent rapidement; des associations et des causes génétiques sont souvent signalées. Il est important de suivre les publications scientifiques dans ce domaine pour bien planifier les traitements.
Lorsque des médicaments sont indiqués, les lignes directrices et les méta-analyses récentes sont en accord : les psychostimulants devraient être envisagés comme traitement de première ligne pour les enfants ayant un TSA associé au TDAH [15][16]. Chez les enfants ayant un TSA, le TDAH devrait être traité en fonction du même algorithme thérapeutique que s’ils avaient seulement un TDAH. Cependant, les enfants et les adolescents ayant un TSA associé au TDAH risquent davantage de ne pas répondre au traitement et de présenter des effets secondaires [15]–[19].
L’irritabilité accompagnée de débordements émotionnels est le principal effet indésirable des stimulants chez les enfants ayant un TSA associé au TDAH [16]–[19]. Une augmentation des comportements stéréotypés, de l’agitation, de la dysphorie et des symptômes psychotiques a également été signalée [16]–[19]. Selon des études restreintes, l’atomoxétine atténue les symptômes de TDAH chez les personnes ayant un TSA associé au TDAH. Cependant, la période nécessaire pour obtenir une réponse complète au traitement est plus longue qu’avec les stimulants [20].
On a observé une diminution importante des symptômes de TDAH chez les enfants ayant un TSA associé au TDAH qui avaient reçu un traitement de guanfacine et de guanfacine à libération prolongée [21][22]. Les antipsychotiques ne sont pas indiqués pour le traitement des symptômes fondamentaux du TDAH [16]. Même si les stimulants sont davantage utilisés pour traiter les enfants ayant un TSA associé au TDAH [22], une pharmacothérapie d’association est également courante dans les cas compliqués par des comorbidités, ce qui inclut l’ajout d’un antidépresseur, d’antipsychotiques ou d’un stabilisateur de l’humeur [22]. Puisque la situation de ces enfants a tendance à être complexe, il est souvent nécessaire de privilégier des évaluations multidisciplinaires régulières pour orienter les objectifs en matière de comportement et d’apprentissage.
On sait que l’activité physique atténue les symptômes de TDAH [23] et améliore la socialisation chez les enfants et les adolescents ayant un TSA [24]; il faudrait les intégrer aux activités quotidiennes. Les données probantes appuient un vaste éventail d’interventions comportementales chez les enfants ayant un diagnostic de TSA ou de TDAH, mais jusqu’à maintenant, peu d’études ont démontré l’efficacité de la prise en charge non pharmacologique ou comportementale du TSA associé au TDAH [22]. Les enfants qui ont un TSA profitent d’interventions comportementales précoces intenses, mais il ne faut pas négliger les symptômes du TDAH. Avant d’amorcer une prise en charge pharmacologique, il faut adopter des interventions standards fondées sur des données probantes pour contrer le TDAH, y compris la formation sur le comportement des parents et des enseignants, assortie d’un fort volet en milieu scolaire, et qui inclut des plans d’intervention individuels (PII) et un soutien scolaire [8][16]. Il faut souvent diriger le patient vers un centre de soins tertiaires pour lui donner accès à des cliniciens qui possèdent des compétences sur une vaste série de troubles du développement et de la santé mentale.
Le diagnostic de HI, que la Classification des troubles mentaux et des troubles du comportement la plus récente (CIM-11) de l’Organisation mondiale de la Santé qualifie de « trouble du développement intellectuel », a également été révisé dans le DSM-5 pour remplacer le diagnostic de déficience intellectuelle du DSM-IV. Le HI est une affection chronique diagnostiquée chez 2 % à 3 % des enfants de plus de cinq ans, qui s’ajoute souvent à d’autres troubles neurodéveloppementaux et de la santé mentale et qui a une incidence sur le pronostic de ces affections. Le HI se caractérise par des déficits développementaux de la fonction cognitive (raisonnement, résolution de problèmes, planification, pensée abstraite, jugement, apprentissage scolaire et apprentissage expérientiel) ou de la fonction adaptative, de manière que les personnes peuvent être incapables de respecter les normes développementales et socioculturelles d’autonomie personnelle et de responsabilité sociale [1]. En cas de HI, le quotient intellectuel (QI) se situe à au moins deux écarts-types (ÉT) sous la moyenne de la population [1]. D’après les critères du DSM-5, la fonction adaptative est utilisée de préférence au QI pour déterminer la gravité du HI (léger, moyen, grave, profond), car les exigences de soutien dépendent largement du niveau de la fonction adaptative [1].
Le TDAH est le principal trouble neurodéveloppemental associé au HI. Sa prévalence est de trois à quatre fois plus élevée chez les enfants et les adolescents ayant un HI que dans la population générale [25]. Cependant, il est particulièrement difficile de diagnostiquer le TDAH chez les personnes ayant un HI, parce que le fonctionnement intellectuel plus faible peut influer sur l’attention et le comportement [26] et « éclipser » le diagnostic [27]. Des symptômes semblables à ceux du TDAH peuvent également masquer (ou révéler) une maladie organique ou psychiatrique connexe [28].
Les symptômes d’inattention, d’hyperactivité et d’impulsivité peuvent se manifester lorsque les exigences scolaires dépassent les capacités intellectuelles de l’enfant. Dans de tels cas, les symptômes disparaissent généralement hors du cadre scolaire. Selon le DSM-5, pour poser un diagnostic de TDAH associé au HI, les symptômes fondamentaux du TDAH doivent être « excessifs pour l’âge mental » et s’observer dans au moins deux contextes différents. Pour l’instant, aucun questionnaire standardisé du comportement ne mesure les symptômes de TDAH dans les populations particulières. Bien que les tests psychologiques ne puissent pas diagnostiquer le TDAH, il est justifié de procéder à des tests d’intelligence chez les enfants ou les adolescents ayant des symptômes de TDAH qui présentent également des difficultés importantes dans les tâches scolaires de base (lecture, orthographe, mathématiques) pour écarter le HI comme facteur contributif [29]. De plus, il faut privilégier une approche multidisciplinaire et posséder des compétences particulières pour évaluer les troubles du comportement chez les enfants et les adolescents ayant un HI et confirmer que l’inattention, l’hyperactivité et l’impulsivité sont bien causées par un TDAH comorbide plutôt que par le seul HI [28].
Peu de recherches portent sur le HI associé au TDAH, mais certaines caractéristiques sont claires : les symptômes fondamentaux du TDAH ont tendance à être plus marqués [29] et moins susceptibles de disparaître avec l’âge [30]. De plus, on observe couramment un taux plus élevé d’agitation, d’agressivité et d’automutilation [31], de traits autistiques ou de comportements stéréotypés (p. ex., balancement) et de troubles des conduites [32]. Le fonctionnement adaptatif, notamment dans les contextes de la vie quotidienne et de la communication sociale, est généralement perturbé chez les enfants et les adolescents ayant un HI associé au TDAH [33].
Au moins 50 % des cas de HI s’associent à des affections chromosomiques (p. ex., syndrome de l’X fragile, syndrome de Klinefelter ou syndrome de Turner), métaboliques (p. ex., aminoacidémies, phénylcétonurie, galactosémie) ou neurologiques (p. ex., neurofibromatose, sclérose tubéreuse, dystrophie myotonique) [34]–[36]. De rares VNC observées chez les enfants ayant un TDAH s’associent également au HI (voir la rubrique sur la génétique du TSA associé au TDAH, ci-dessus). Les cliniciens doivent procéder à des examens chez les patients ayant un HI associé au TDAH, conformément au document de principes connexe sur le sujet.
L’optimisation des interventions dans l’environnement et à l’école, de manière à tenir simultanément compte des besoins cognitifs et émotionnels de l’enfant ou de l’adolescent, constitue un aspect important du traitement. Des thérapies coordonnées contribuent à abaisser la dose de médicament et à limiter le risque d’effets indésirables. Étant donné les effets bénéfiques démontrés de l’activité physique chez les personnes ayant un TDAH [23], il faudrait encourager les programmes d’exercices chez les enfants et les adolescents ayant un HI associé au TDAH.
L’efficacité clinique du méthylphénidate à courte durée d’action a fait l’objet d’essais aléatoires et contrôlés pour prendre en charge les symptômes de TDAH chez les enfants ayant un HI associé au TDAH [37]. Le taux de réponse de 45 % à 66 % au méthylphénidate dépasse considérablement celui d’un placebo, mais se situe sous le taux de réponse du TDAH seul [29]. Un QI supérieur à 50 est prédictif d’une meilleure réponse aux stimulants [29][38], mais un QI très faible (HI grave, profond) est prédictif d’une moins bonne réponse [29][39]. De plus, les enfants ayant un HI associé au TDAH qui prennent du méthylphénidate à courte durée d’action sont plus vulnérables à des effets secondaires comme les tics et le retrait social [40].
Selon de récentes lignes directrices canadiennes, lorsqu’il faut prescrire des médicaments pour prendre en charge les symptômes de TDAH chez les enfants ou les adolescents ayant un HI, il faut d’abord privilégier les psychostimulants [41]. Lorsque la réponse aux psychostimulants combinés à une psychothérapie est sous-optimale, des non-stimulants sont recommandés. En cas de comportements qui provoquent une incapacité fonctionnelle et qui ne répondent pas aux interventions comportementales, aux stimulants ou aux non-stimulants, des neuroleptiques (p. ex., rispéridone) peuvent être prescrits, mais avec une extrême prudence compte tenu du fardeau important de leurs effets secondaires [41]. Comme l’indiquent les lignes directrices de la Canadian Alliance for Monitoring Effectiveness and Safety of Antipsychotics (CAMESA), une surveillance attentive des événements métaboliques et neurologiques indésirables s’impose [42].
Peu de données portent sur l’utilisation de non-stimulants et de psychostimulants à longue durée d’action chez les enfants et les adolescents ayant un HI et un TDAH. Il manque cruellement de données probantes pour appuyer la prescription et la surveillance des médicaments au sein de cette population [43].
Depuis les années 1990, les avancées des soins intensifs néonatals ont permis d’accroître considérablement le taux de survie des nouveau-nés prématurés [44]. Les études et les programmes de suivi situent désormais le très petit poids de naissance (TPPN) à < 1 500 g et l’extrême petit poids de naissance (EPPN) à < 1 000 g. La « grande prématurité » et l’« extrême prématurité » (EP) désignent les nouveau-nés venus au monde avant 30 semaines et 26 semaines d’âge gestationnel (AG), respectivement [45]. Les nouveau-nés prématurés qui survivent présentent un taux moins élevé d’incapacités, y compris la paralysie cérébrale, les graves déficiences visuelles ou auditives et la déficience cognitive profonde définie par le quotient de développement ou le QI [45][46].
Le taux d’incapacités majeures a diminué, mais les séquelles associées au petit poids de naissance et à la prématurité, telles qu’une déficience cognitive plus légère et les troubles neurodéveloppementaux et mentaux connexes, augmentent [45][47]-[49]. Près de 50 % des enfants d’une EP ou ayant un EPPN ont des troubles du développement [44][45][47]. L’atteinte cognitive, l’inattention, l’hyperactivité, les troubles de comportement internalisés et les troubles de socialisation persistent bien après la période préscolaire et influent sur la réussite scolaire plus tard pendant l’enfance [44][46]-[49].
Dans une cohorte d’enfants d’EPPN qui ont été suivis jusqu’à l’âge de six ans et quatre mois, les chercheurs ont observé une prévalence accrue d’incapacités en fonction de l’âge scolaire par rapport aux autres enfants du même âge [46]. L’atteinte cognitive était l’incapacité la plus courante (QI de 1 à 2 ÉT sous la moyenne chez 25 % des enfants et de plus de 2 ÉT sous la moyenne chez 21 % d’entre eux). La fréquence de l’atteinte cognitive passait à 41 % lorsque les enfants d’EPPN étaient comparés à leurs camarades de classe.
Des chercheurs ont suivi 219 enfants d’EPPN jusqu’à l’âge de huit ans. Dans leur étude, ils ont recensé beaucoup plus d’affections chroniques que chez les sujets témoins d’un poids de naissance normal (PNN), ainsi qu’un besoin accru de mesures de soutien et de services, en plus des exigences habituelles [44].
On remarque également une association entre l’AG ou le poids de naissance et les scores cognitifs en fonction de l’âge scolaire [45]. Après 26 semaines d’AG, les atteintes diminuent de manière presque linéaire jusqu’à 32 semaines d’AG. Même après cet AG et avoir procédé à la correction en fonction de la prématurité, la moyenne demeure de 5 ÉT sous celle des pairs de PNN [44]–[46]. La plupart des troubles d’apprentissage scolaire, des services de soutien, des PII et des placements en éducation spécialisée sont fonction de faibles scores cognitifs, mais des études plus récentes ont fait ressortir les problèmes d’attention et du comportement et leurs effets sur l’apprentissage [44]–[49].
Chez les enfants, la grande prématurité ou l’EPPN s’associe à beaucoup plus de troubles neurodéveloppementaux et à des troubles du comportement beaucoup plus variés à l’âge scolaire que les enfants de PNN [50]–[52].
Des comportements qui sont souvent difficiles à gérer sont liés à des symptômes caractéristiques du TDAH : l’inattention, les troubles internalisés (anxiété, dépression, retrait, somatisation) et les problèmes de socialisation [47][50][52]. Cette grappe de difficultés est collectivement désignée de « phénotype comportemental du prématuré » [48][51][52]. Les troubles disruptifs du comportement, tels que le trouble oppositionnel avec provocation (TOP), le trouble des conduites et la présentation hyperactive/impulsive du TDAH, sont moins fréquents [48]–[52].
Environ deux fois plus d’enfants d’une cohorte d’EPPN et d’une EP nés entre 2001 et 2003 et évalués à la maternelle répondaient aux critères d’une présentation combinée du TDAH que les sujets témoins de PNN, mais près du quintuple répondaient aux critères d’une présentation inattentive du TDAH [53].
À l’âge de huit ans, les enfants d’EPPN présentaient beaucoup plus de problèmes de comportement que ceux de PNN, de même qu’un taux plus élevé de TDAH et de troubles anxieux [47]. Ils étaient près de deux fois plus nombreux à avoir une présentation inattentive du TDAH que les sujets témoins de PNN [47]. À l’âge de 14 ans [52], la même cohorte présentait un taux considérablement plus élevé de QI sous la normale (14 % avaient un QI inférieur à 70) et devait plus souvent bénéficier d’un PII (45 %). Les symptômes de présentation inattentive du TDAH, de troubles anxieux et de problèmes de socialisation déjà observés se maintenaient pendant toute la période scolaire. Ces symptômes ne s’accompagnaient pas de TOP, de troubles des conduites, ni de comportements perturbateurs caractéristiques du TDAH [47][52]. Cette constatation est étayée par d’autres études [51]–[56], qui ont révélé que les enfants d’une EP sont plus susceptibles d’avoir un trouble psychiatrique à l’âge de 11 ans que les sujets témoins de PNN [50].
Une étude de cohorte nationale suédoise auprès de plus d’un million d’enfants suivis et traités à cause d’un TDAH entre l’âge de six et 19 ans [57] a démontré une augmentation graduelle du rapport de cotes pour l’emploi de médicaments contre le TDAH, laquelle était proportionnelle à la prématurité à la naissance, par rapport aux nouveau-nés à terme. Cet effet ne s’expliquait pas par des données génétiques, périnatales ou socioéconomiques, même si ce dernier facteur modifiait le risque de TDAH chez les enfants modérément prématurés [57].
Cette recherche a été soutenue par une autre étude [58], qui comparait des cohortes d’enfants peu prématurés (34 à 37 semaines d’AG) et à terme (37 à 42 semaines d’AG). Ces recherches n’ont relevé aucune différence statistiquement significative de l’incidence cumulative de TDAH entre les groupes, ce qui laisse supposer que les nourrissons peu prématurés et à terme présentent des taux de TDAH semblables.
La plupart des provinces et des territoires du Canada sont dotés de programmes de suivi pour surveiller l’évolution du développement de cette population jusqu’à l’âge de deux ans, et parfois plus longtemps. Cependant, seules quelques régions sociosanitaires poursuivent la surveillance jusqu’à l’âge scolaire, lorsque les symptômes sont les plus susceptibles de nuire au fonctionnement. La surveillance du développement et du comportement chez les enfants nés prématurément, le dépistage précoce des préoccupations et la mise en place d’interventions, de mesures de soutien et de services opportuns peuvent améliorer considérablement les résultats cliniques. Pourtant, aucune publication scientifique ne porte expressément sur le traitement des symptômes du TDAH chez les enfants d’un EPPN et d’une EP ou qui sont nés prématurément. Lorsque ces enfants doivent prendre des médicaments, on respecte les mêmes protocoles que pour les enfants à terme, mais il faut tenir compte de considérations particulières en matière de dépistage, de surveillance et de traitement des troubles du comportement internalisés.
Le comité d’étude du fœtus et du nouveau-né, le comité de la pédiatrie communautaire et le comité de la santé de l’adolescent de la Société canadienne de pédiatrie, de même que des représentants de l’Académie canadienne de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent (ACPEA), ont révisé le présent document de principes.
Membres : Debbi Andrews MD (présidente), Susan Bobbitt MD, Alice Charach MD, Brenda Clark MD (membre sortante), Mark E. Feldman MD (représentant du conseil sortant), Johanne Harvey MD (ancienne représentante du conseil), Benjamin Klein MD, Oliva Ortiz-Alvarez MD, Sam Wong (représentant du conseil)
Représentantes : Sophia Hrycko MD, Association canadienne de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent; Angie Ip MD, section de la pédiatrie du développement de la SCP; Aven Poynter MD, section de la santé mentale de la SCP
Auteures principales : Brenda Clark MD, Stacey A. Bélanger MD, Ph. D.
Avertissement : Les recommandations du présent document de principes ne constituent pas une démarche ou un mode de traitement exclusif. Des variations tenant compte de la situation du patient peuvent se révéler pertinentes. Les adresses Internet sont à jour au moment de la publication.
Mise à jour : le 31 mai 2024