Document de principes
Affichage : le 20 octobre 2022
Susan Bobbitt MD, Anne Kawamura MD, Natasha Saunders MD, Suneeta Monga MD, Melanie Penner MD, Debra Andrews MD Société canadienne de pédiatrie, Comité de la santé mentale et des troubles du développement
Paediatr Child Health 2023 28(1):52–59.
Les troubles anxieux sont les problèmes de santé mentale les plus courants chez les enfants et les adolescents canadiens. La Société canadienne de pédiatrie a préparé deux documents de principes qui résument les données probantes à jour sur leur diagnostic et leur prise en charge. Ces documents contiennent des conseils fondés sur des données probantes afin d’aider les professionnels de la santé à prendre des décisions à l’égard des soins aux enfants et aux adolescents atteints de ces troubles. La deuxième partie, qui porte sur la prise en charge, vise à :
1. passer en revue les données probantes et le contexte de diverses approches cliniques qui combinent des interventions comportementales et pharmacologiques pour traiter les atteintes de façon appropriée;
2. décrire le rôle de l’éducation et de la psychothérapie pour la prévention et le traitement des troubles anxieux;
3. décrire l’utilisation de la pharmacothérapie, y compris les effets secondaires et les risques qui s’y rapportent.
Les recommandations sur la prise en charge de l’anxiété reposent sur les lignes directrices à jour, une analyse bibliographique et un consensus d’experts. Il est à souligner que, dans le présent document, le terme « parent » (au singulier ou au pluriel) inclut les personnes qui s’occupent principalement de l’enfant et toutes les configurations familiales.
L’anxiété chez les enfants et les adolescents – partie 1 : le diagnostic
Mots-clés : anxiété; effets indésirables; traitement pharmacologique; psychoéducation; psychothérapie; thérapie cognitivo-comportementale
Les peurs et les inquiétudes occasionnelles font partie du développement normal des enfants et des adolescents. Il est important de s’occuper de ces sentiments d’anxiété, de les nommer et de les valider (voir l’encadré 1) pour acquérir les réponses adaptatives appropriées. Des troubles anxieux peuvent toutefois être diagnostiqués lorsque les peurs et les inquiétudes provoquent une détresse marquée et persistante ou nuisent au fonctionnement quotidien de l’enfant ou de l’adolescent. Dans bien des cas, les troubles anxieux ne se résorbent pas sans traitement [1]-[3], ce qui fait ressortir l’importance de les dépister, de les diagnostiquer et de les prendre en charge rapidement. Les troubles anxieux sont les principaux troubles de santé mentale chez les jeunes [4][5], mais ils se traitent bien. Il est essentiel que les professionnels de la santé possèdent les compétences pour les dépister, les évaluer et les prendre en charge dans la plupart des milieux cliniques.
Pour assurer une prise en charge optimale des troubles anxieux, le professionnel de la santé doit souvent adopter une approche multimodale qui mobilise à la fois l’enfant ou l’adolescent, ses parents et les autres figures d’attachement familiales. Lorsqu’il évalue les meilleures modalités thérapeutiques pour un jeune, il doit tenir compte des facteurs suivants :
Quelles que soient les modalités thérapeutiques privilégiées, il est essentiel de mesurer la réponse de l’enfant ou de l’adolescent [7][8].
Les approches de prise en charge de l’anxiété les plus fréquentes et les plus efficaces incluent la psychoéducation, la psychothérapie (qui comprend les programmes de pratiques parentales, la thérapie cognitivo-comportementale (TCC) et les interventions auprès de la famille) et la pharmacothérapie. Le présent document de principes donne un aperçu de chacune de ces possibilités de prise en charge et des données probantes s’y rattachant.
La psychoéducation fait partie des interventions de première ligne pour prendre en charge l’anxiété. Les enfants et les adolescents doivent savoir que certains sentiments d’anxiété sont normaux et qu’il ne faut pas en ignorer ou en minimiser la cause ou l’intensité. Ils peuvent apprendre que les sentiments de malaise sont courants et peuvent être nommés (comme une « inquiétude », de l’« anxiété » ou une « chose effrayante »). Les échanges et les explications sur les manifestations physiques et psychologiques (p. ex., somatiques, cognitives et comportementales), dans un langage adapté à l’âge et au développement, peuvent aider les enfants, les adolescents et les familles à reconnaître ce qu’ils ressentent et pourquoi ils le ressentent. En aidant les parents à comprendre que des raisons liées au développement et au milieu de vie, qui n’ont rien à voir avec l’anxiété, peuvent expliquer les comportements de l’enfant, il est possible d’orienter des pratiques parentales plus positives. Le professionnel de la santé doit expliquer aux parents l’importance de réponses empathiques à l’anxiété de l’enfant, mais doit préciser que le fait d’aider l’enfant à affronter ses peurs représente un objectif parental crucial. En encourageant des stratégies d’adaptation aux facteurs de stress de la vie et en donnant l’exemple, le parent peut aider l’enfant à « éviter l’évitement », c’est-à-dire à arrêter d’éviter les choses qui, au départ, semblent insurmontables.
Il peut être efficace de commencer par renforcer des habitudes familiales positives pour gérer les troubles anxieux, telles que le partage des repas et la régularité des heures de coucher et de réveil, les limites au temps d’écran, la sélection des émissions et la diminution de la consommation de caféine [9]. Parmi les autres mesures positives, l’encouragement de l’exercice régulier, les activités familiales communes et la participation plus autonome des jeunes aux activités qu’ils aiment sont également à souligner [10]. La détermination et la résolution des facteurs de stress à la maison, à l’école et dans le cadre des relations sociales font partie de la psychoéducation et peuvent atténuer de légers symptômes de troubles anxieux. La recommandation d’applications pour relaxer et le recours à un « journal des humeurs » constituent d’autres mesures de prise en charge [11][12].
Il est crucial d’adopter des styles et des stratégies de pratiques parentales positives pour prendre en charge les troubles anxieux. Les recherches démontrent que les parents peuvent acquérir ces habiletés et les mettre en œuvre en tout temps, mais qu’elles sont particulièrement efficaces lorsqu’elles sont utilisées tôt, auprès des jeunes enfants. Les données probantes démontrent également que des pratiques parentales positives peuvent réduire le risque de trouble anxieux [13].
La santé relationnelle de la famille [14] dépend en partie de la prise en charge des facteurs de stress de la vie et des réponses individuelles au stress. Les parents peuvent recourir aux stratégies et approches suivantes pour promouvoir un attachement solide, renforcer la relation avec l’enfant et affronter l’anxiété : [15][16].
Encadré 1. Des conseils de pratiques parentales positives pour prendre l’anxiété en charge |
1. Aidez les enfants et les adolescents à reconnaître, à admettre et à nommer leurs sentiments, y compris la manière dont ils se sentent physiquement, et à qualifier leurs émotions (p. ex., inquiétude, anxiété ou même peur). 2. Évitez l’évitement par des encouragements doux, mais fermes. Prenez le temps de parler d’émotions fortes ou de sujets sensibles, et essayez des phrases comme Tu as l’air inquiet(ète). Est-ce que quelque chose te préoccupe? ou Tu sembles très en colère. Aimerais-tu en parler? 3.Faites preuve d’empathie et légitimez les sentiments d’anxiété, mais tâchez de ne pas les renforcer (Je sais que tu as peur, ET je sais aussi que tu as le courage d’y aller quand même). 4. Formez des liens et maintenez un attachement solide en participant à des jeux libres dirigés par l’enfant lorsqu’(il/elle) est plus jeune, et en demeurant attentif(ve) et intéressé(e) lorsqu’(il/elle) est adolescent(e) [14][17] :
5. Favorisez la confiance en soi (affect positif) par des compliments efficaces :
6. Encouragez les opinions et les choix. Reconnaissez l’autonomie croissante des enfants plus âgés et soulignez et saluez les prises de décision avisées et la résolution de problèmes [17]. 7. Pour rendre l’anxiété plus facile à gérer, divisez la tâche en petites étapes pratiques (dans la mesure du possible) et faites du renforcement positif à chacune de ces étapes. 8. Récompensez les tentatives et les résultats approximatifs et complimentez le processus tout autant que les résultats. Concentrez-vous sur les forces plutôt que sur les faiblesses. 9. Donnez l’exemple d’habiletés et de techniques d’adaptation comme les respirations profondes, la relaxation de la tension musculaire, la visualisation, la pleine conscience, la distraction et le dialogue intérieur positif. 10. Soyez présent(e) dans la scolarisation. Pour votre enfant ou adolescent(e) anxieux(se), aidez les enseignants à comprendre les sources du problème et les comportements que son anxiété génère. Par exemple, expliquez que lorsque l’enfant évite des tâches en classe ou semble adopter un comportement oppositionnel, il/(elle) le fait probablement à cause de son anxiété, et assurez-vous que des mesures de soutien ou des aménagements appropriés sont en place. 11. Chez le jeune enfant qui présente des signes d’évitement du milieu de garde ou de l’école :
12. Donnez l’exemple de façons positives de composer avec les conflits ou la détresse pour gérer l’anxiété :
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Le traitement de première ligne recommandé en cas de troubles anxieux chez les enfants et les adolescents est la psychothérapie avec un thérapeute formé [19]. De nombreux types de psychothérapie peuvent soutenir les familles, y compris l’entrevue motivationnelle, la thérapie axée sur les émotions et les thérapies de pleine conscience et d’acceptation, mais la TCC est le traitement fondé sur des données probantes le plus fréquent en cas de troubles anxieux [15].
La TCC est le pilier du traitement psychothérapeutique de l’anxiété, selon la prémisse que les pensées influent sur les sentiments et les comportements. La TCC est une psychothérapie limitée dans le temps et axée sur les objectifs qui fournit des outils et des stratégies afin d’aider les patients à reconnaître leurs états émotionnels, tels que les signes et symptômes d’anxiété, et à utiliser des techniques de relaxation et des stratégies cognitives pour les prendre en charge. Ainsi, les jeunes peuvent apprendre à reconnaître les signes et symptômes de leur anxiété (p. ex., céphalées, douleurs abdominales, accélération du rythme cardiaque) et à utiliser des techniques pour les prendre en charge, telles que la relaxation, la visualisation ou les exercices de respiration profonde. Ils apprennent aussi à reconnaître les schémas ou les prédicteurs d’une « pensée anxieuse » et à les remplacer par des pensées plus positives. Il est possible d’exposer et de désensibiliser l’enfant ou l’adolescent aux éléments déclencheurs de l’anxiété d’une manière graduelle, ouverte et sans jugement, tout en l’encourageant à privilégier les « comportements courageux » de préférence aux « comportements évitants ».
Des études ont évalué le recours à la TCC en cas de divers diagnostics d’anxiété chez les enfants, y compris l’anxiété généralisée, l’anxiété sociale, des phobies particulières, le trouble panique, l’anxiété de séparation et le mutisme sélectif [15]. Selon une récente analyse Cochrane de 87 études auprès de presque 6 000 participants, par rapport aux enfants figurant sur des listes d’attente ou non traités, la TCC accroissait la probabilité que l’enfant atteint d’un diagnostic d’anxiété primaire entre en rémission après le traitement (rapport de cotes (RC) 5,45, intervalle de confiance à 95 % (IC) 3,90 à 7,60) [15]. Cependant, par rapport au « traitement habituel » de l’anxiété, qui incluait d’autres formes de psychothérapie ou qui donnait accès à n’importe laquelle des interventions psychosociales ou pharmacologiques offertes, la qualité des données probantes à l’égard de l’efficacité était plus faible, et il n’y avait pas de différence importante entre les groupes recevant une TCC et ceux recevant le « traitement habituel ». Lorsqu’on compare la TCC aux médicaments pour les enfants éprouvant de l’anxiété, une étude récente et une étude précurseure [20][21] ont toutes deux établi qu’une combinaison de TCC et de sertraline était plus efficace que la sertraline ou la TCC seule. La TCC demeure la meilleure intervention psychosociale étudiée pour traiter l’anxiété chez les enfants, et d’après les données à jour, la TCC comporte des avantages supplémentaires lorsqu’elle est combinée à d’autres modalités thérapeutiques, telles que les médicaments.
Le mode de prestation est un point important à envisager au moment de choisir un programme de TCC. La TCC peut être enseignée individuellement ou en groupe, directement aux enfants, aux adolescents ou aux parents, ou à la fois avec les jeunes et leurs parents, et en personne ou virtuellement [22]. Il ne semble pas y avoir de différence de résultats entre la prestation individuelle ou en groupe, ce qui a des répercussions positives sur l’accès aux soins [15].
Le mode de prestation n’a peut-être pas d’effet sur l’efficacité du traitement, mais l’âge et le développement de l’enfant influent bel et bien sur les résultats. Les familles d’enfants de quatre à cinq ans ont profité de programmes de TCC qui comprennent l’éducation des parents au moyen de concepts et de matériaux adaptés au développement de l’enfant, pour aider celui-ci à reconnaître ses pensées et ses sentiments [23]-[25]. En plus de la participation des parents, de nombreux programmes comprennent des aménagements pour les enfants plus jeunes, tels qu’un moins grand nombre de demandes verbales et le recours à des supports visuels pour expliquer des concepts plus abstraits [24].
Les enfants qui ont un trouble du neurodéveloppement ou de l’apprentissage courent un risque élevé de trouble anxieux concomitant [26][27], et c’est pourquoi il est particulièrement important de s’assurer qu’ils puissent avoir accès à un traitement de l’anxiété fondé sur des données probantes. L’étude des programmes de TCC axés sur les enfants ayant des affections neurodéveloppementales, comme le trouble du spectre de l’autisme [28][29], est associée à des taux de rémission de l’anxiété démontrée plus élevés que le « traitement habituel » [15]. Les enfants n’ont pas à être exclus d’une TCC en raison d’affections cooccurrentes. Il faut plutôt prévoir des mesures supplémentaires pour répondre à leurs besoins développementaux et s’appuyer sur leurs forces.
La psychothérapie est le traitement de première ligne des troubles anxieux chez les enfants et les adolescents en cas de symptômes d’anxiété légers à modérés, mais les professionnels de la santé peuvent également envisager des médicaments en cas de symptômes intenses ou modérés et d’une réponse partielle à la psychothérapie. Comme on l’a indiqué plus haut, il est démontré que la combinaison de la psychothérapie et de la pharmacothérapie améliore les résultats cliniques [15][30]. Plusieurs facteurs doivent être envisagés au moment de prescrire des médicaments pour traiter un trouble anxieux pédiatrique, y compris le diagnostic précis, l’âge et la phase du développement, le profil d’efficacité et d’innocuité des médicaments, le risque d’effets secondaires, la voie d’administration, le début d’action et les interactions avec les autres médicaments que l’enfant peut prendre, y compris les traitements complémentaires et parallèles [31].
Plusieurs médicaments sont utilisés pour le traitement de l’anxiété, les plus efficaces étant les inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine (ISRS) [19][32]. Selon des lignes directrices fondées sur des données probantes avalisées par l’American Academy of Child and Adolescent Psychiatry, les ISRS sont les médicaments de première intention pour le traitement des troubles anxieux chez les enfants et les adolescents de six à 18 ans [33]. Il est possible d’envisager les inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine et de la noradrénaline (ISRN) pour le traitement de l’anxiété sociale, de l’anxiété généralisée, de l’anxiété de séparation ou du trouble panique [19]. Les ISRS et les ISRN peuvent atténuer les symptômes d’anxiété, améliorer le fonctionnement global et contribuer à une rémission [19].
Le professionnel de la santé devrait envisager de commencer par un traitement combiné faisant appel à un ISRS et à la TCC chez les enfants et les adolescents atteints de troubles anxieux modérés à graves, car il est démontré que cette double approche améliore le fonctionnement global, favorise la réponse au traitement et encourage la rémission. La monothérapie au moyen de la TCC ou d’un ISRS était associée à une moins bonne réponse au traitement et à un taux de récidive plus élevé [19][20][21][33].
Au moment de la rédaction du présent document, Santé Canada n’avait pas approuvé l’utilisation des ISRS pour les enfants de moins de 18 ans. Selon des données probantes tirées d’études randomisées contrôlées contre placebo, les ISRS sont à la fois sécuritaires et efficaces pour le traitement des troubles anxieux chez les enfants et les adolescents [34][35]. Cependant, les données thérapeutiques n’ont pas démontré la supériorité d’un ISRS plutôt qu’un autre, et il a été établi que la paroxétine est à éviter dans cette population en raison de sa demi-vie très courte et de son risque plus élevé de syndrome de sevrage après l’arrêt des ISRS [36].
Santé Canada et d’autres organismes ont revu l’association des ISRS avec l’idéation et les comportements suicidaires [37]-[39]. Le médecin de première ligne doit surveiller les tendances suicidaires des enfants et des adolescents qui commencent à prendre des ISRS pour soigner un trouble anxieux et consigner les observations au dossier [36].
Le patient et sa famille doivent recevoir de l’information détaillée au sujet de l’utilisation de ces médicaments dans une indication non autorisée [40], de leurs effets secondaires possibles et de la période nécessaire avant d’observer une amélioration des symptômes. Avant que l’enfant ou l’adolescent commence à prendre ces médicaments, le professionnel de la santé doit s’enquérir de ses symptômes physiques d’anxiété et les consigner au dossier pour s’assurer de ne pas les confondre avec des effets secondaires du médicament. L’enfant ou l’adolescent doit commencer par recevoir de faibles doses, puis la posologie doit être accrue graduellement en fonction des effets observés. Les posologies courantes pour le traitement de l’anxiété chez les enfants et adolescents sont exposées au tableau 1 [31][41].
L’enfant ou l’adolescent pourrait remarquer une atténuation de la gravité de ses symptômes dans les deux premières semaines suivant le début de la prise des médicaments, mais il devra peut-être attendre de six à huit semaines avant de constater une amélioration cliniquement significative, et il n’en éprouvera les effets bénéfiques maximaux qu’à compter de la douzième semaine environ [42]. D’ordinaire, les doses d’ISRS sont accrues toutes les deux à quatre semaines, en fonction de la réponse au traitement [43]. Un formulaire de suivi de la médication [31][44] peut contribuer aux discussions sur la posologie ou l’arrêt de la médication.
Un document de principes de la Société canadienne de pédiatrie présente une vue d’ensemble des ISRS [36].
Après avoir obtenu le consentement de l’enfant ou de l’adolescent, des communications ouvertes et continues entre l’équipe soignante de l’enfant ou de l’adolescent et le personnel scolaire peuvent contribuer à déterminer et à soulager des facteurs de stress comme l’intimidation ou un problème d’apprentissage. La planification du traitement doit inclure des mesures de soutien particulières pour les élèves atteints d’anxiété, y compris du temps additionnel pour effectuer les examens ou les devoirs, la participation d’un éducateur spécialisé pour contribuer à individualiser les stratégies de prise en charge de l’anxiété et de résolution de problèmes et la création d’un plan d’intervention personnalisé, en s’assurant que l’élève, les parents et l’équipe scolaire se sont mis d’accord sur l’apport de chacun.
Le médecin de première ligne doit revendiquer des aménagements scolaires lorsqu’ils sont nécessaires et s’assurer que l’enfant ou l’adolescent ayant des troubles anxieux a accès à un clinicien en santé mentale (p. ex., thérapeute, psychiatre, pédiatre ou travailleur social) et est en communication régulière avec lui. La participation d’un tel clinicien est indispensable pour optimiser la réponse au traitement, modifier le contexte ou le milieu lorsque la situation l’indique et s’assurer de transmettre de l’information homogène au patient et à sa famille. Lorsque l’enfant ou l’adolescent est en rémission, le clinicien en santé mentale peut harmoniser l’accès aux services et s’assurer de la continuité des soins en cas de récidive.
Il est important de surveiller les atteintes fonctionnelles tout au long du traitement au moyen d’échelles validées d’évaluation des symptômes déclarés par l’enfant, l’adolescent et les parents, et de mesures globales du fonctionnement telles que la fréquentation scolaire et la participation aux activités. Cette surveillance doit également tenir compte de la satisfaction du patient vis-à-vis du traitement, de son adhésion à ce traitement et de la rémission. Il est crucial d’obtenir cette information avant et pendant chaque rencontre clinique [45]-[47] pour optimiser la prise en charge, comprendre les symptômes d’anxiété de chaque patient et évaluer l’effet du traitement [45][48][49]. En regroupant les mesures des résultats cliniques liés à l’anxiété, les organisations de santé pourront trouver des moyens d’améliorer l’équité et l’efficacité des programmes de traitement de l’anxiété [45][48][50].
Presque partout au Canada, les maladies mentales chez les enfants et les adolescents ont atteint une telle ampleur qu’elles dépassent la capacité des soins que les cliniciens en santé mentale (qu’ils soient médecins ou non) peuvent offrir. La psychothérapie et les programmes de pratiques parentales offerts par des cliniciens agréés en santé mentale des enfants (p. ex., psychologues cliniciens, travailleurs sociaux) ne sont souvent accessibles qu’aux familles qui détiennent une assurance privée ou qui ont les moyens de payer eux-mêmes ces services. La plupart des enfants et adolescents canadiens ne peuvent pas accéder rapidement à des traitements de première ligne de qualité pour soigner leurs troubles anxieux.
Pour corriger les lacunes en matière de soins en santé mentale des enfants et des adolescents, il faudra renforcer les capacités communautaires et s’assurer que les organismes qui offrent des services de soutien soient dotés de programmes de pratiques parentales et de formation professionnelle [51][52]. Des campagnes de sensibilisation publique peuvent faire appel aux réseaux sociaux pour faire connaître les enjeux en santé mentale à la fois aux jeunes et à leurs parents, de même que les symptômes d’anxiété, les mesures de santé publique pour promouvoir la santé mentale et les ressources pour accéder aux soins. Il est urgent de tenir des recherches et de lancer des programmes ciblés en appui à une prestation des soins adaptée à la culture des populations démesurément touchées par les maladies mentales. Les technologies d’assistance et les technologies en ligne sont prometteuses pour accroître l’accès aux services de santé mentale et faciliter les interventions à moindre coût, mais de nombreuses difficultés et de nombreuses incertitudes demeurent [53]. Le rôle des services en présentiel et des services virtuels devra être exploré à mesure que les données probantes émergeront sur le sujet.
Les professionnels de la santé qui travaillent en milieu pédiatrique, notamment les médecins de première ligne, sont bien placés pour s’informer des inquiétudes au sujet de l’anxiété de l’enfant ou de l’adolescent et pour être à l’écoute de ces inquiétudes. Pour contribuer à la prise en charge de sentiments d’anxiété normaux et adaptés au développement, les professionnels de la santé doivent être prêts à offrir du counseling aux jeunes patients et à leurs parents sur :
Lorsque les enfants et les adolescents ressentent un degré d’anxiété plus élevé, les professionnels de la santé devraient être en mesure de conseiller des stratégies (p. ex., pratiques parentales positives), des techniques (respiration profonde, distraction, dialogue intérieur positif) ou des outils (p. ex., applications de relaxation ou journal des humeurs) de base pour gérer leurs symptômes.
Les professionnels de la santé qui travaillent en milieu pédiatrique doivent être prêts à répondre rapidement et de manière proactive aux symptômes des troubles anxieux et être en mesure de le faire. Les étapes suivantes sont essentielles pour optimiser la prise en charge :
Le comité de la pédiatrie communautaire, le comité de la pharmacologie et des substances dangereuses et le comité de la santé de l’adolescent de la Société canadienne de pédiatrie ont révisé le présent document de principes, de même que l’Académie canadienne de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent, qui l’a également approuvé. La SCP remercie la docteure Debra Andrews (1956-2020), ancienne présidente du comité de de la santé mentale et des troubles du développement, qui a participé à la rédaction du présent document de principes.
COMITÉ DE LA SANTÉ MENTALE ET DES TROUBLES DU DÉVELOPPEMENT DE LA SOCIÉTÉ CANADIENNE DE PÉDIATRIE (2020-2021)
Membres : Susan Bobbitt MD, Mark Feldman MD FRCPC (représentant du conseil), Anne Kawamura MD (présidente), Benjamin Klein MD, Oliva Ortiz-Alvarez MD, Rageen Rajendram MD (membre résident), Natasha Saunders MD
Représentantes : Sophia Hrycko MD FRCPC (Académie canadienne de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent), Melanie Penner MD (section de la pédiatrie du développement), Aven Poynter MD FRCPC (section de la santé mentale)
Auteures principales : Susan Bobbitt MD, Anne Kawamura MD, Natasha Saunders MD, Suneeta Monga MD, Melanie Penner MD, Debra Andrews MD
Avertissement : Les recommandations du présent document de principes ne constituent pas une démarche ou un mode de traitement exclusif. Des variations tenant compte de la situation du patient peuvent se révéler pertinentes. Les adresses Internet sont à jour au moment de la publication.
Mise à jour : le 8 février 2024