Affiché le 27 mai 2015 par la Société canadienne de pédiatrie | Permalink
Catégorie(s) : Défense d’intérêts
Le 6 mai, la docteure Catherine Pound, membre du comité de nutrition et de gastroentérologie de la SCP, a comparu aux audiences du Comité permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie du Sénat au nom de la SCP. La docteure Pound a parlé aux sénateurs de l’incidence croissante d’obésité au Canada, particulièrement chez les enfants. Elle nous a fait part de ses commentaires.
Nous vous remercions de nous donner l’occasion de témoigner devant ce comité. La Société canadienne de pédiatrie est consciente du caractère critique de l’épidémie d’embonpoint et d’obésité au Canada. En effet, le Canada affiche l’un des taux d’obésité juvénile les plus élevés des pays industrialisés, se classant au sixième rang des 34 pays de l’OCDE (Organisation de coopération et de développement économique)1. D’après les critères de l’OMS (Organisation mondiale de la Santé), près de 20 % des Canadiens de cinq à 17 ans font de l’embonpoint, et près de 12 % sont obèses2. Ces chiffres sont encore plus élevés au sein des populations vulnérables, particulièrement chez les enfants d’origine autochtone.
Le problème de l’embonpoint et de l’obésité exerce une pression importante sur le système de santé. En 2008, les coûts économiques de l’obésité étaient évalués à 4,6 milliards de dollars, compte tenu des coûts associés aux maladies chroniques liées à l’obésité3. Les pédiatres voient désormais des enfants présenter des comorbidités qu’on observait auparavant surtout chez les adultes, y compris l’insulinorésistance, le diabète de type 2 et l’hypertension. L’excès de poids chez les jeunes s’associe également à une mauvaise santé émotionnelle, à une baisse de l’estime de soi et à une diminution du bien-être en société. Si on n’intervient pas, les jeunes qui font de l’embonpoint ou sont obèses deviendront des adultes qui font de l’embonpoint ou qui sont obèses. Étant donné la difficulté de corriger un embonpoint ou une obésité établis, il est essentiel d’insister sur les stratégies préventives.
Le problème de l’obésité et de l’embonpoint est multifactoriel. Des facteurs génétiques, économiques, culturels, environnementaux, nutritionnels et liés à l’activité physique y contribuent, et les déterminants socioéconomiques de la santé y sont liés.
Il faudra susciter des changements soutenus aux environnements comportementaux et sociétaux pour rééquilibrer l’équation entre l’apport calorique et la dépense énergétique.
Peu d’enfants consomment la quantité quotidienne recommandée de fruits et de légumes. Il est difficile pour les enfants des familles à faible revenu d’avoir accès à des aliments sains, car le coût des aliments nutritifs est trop souvent prohibitif. L’obésité est étroitement liée à l’insécurité alimentaire, et en 2012, on estimait que 1,15 million d’enfants du Canada vivaient dans un ménage aux prises avec un certain degré d’insécurité alimentaire4.
De toute évidence, l’absence d’activité physique contribue également au problème. En effet, 93 % des enfants de cinq à 11 ans et 96 % de ceux de 12 à 17 ans ne respectent pas les Lignes directrices canadiennes en matière d’activité physique5, qui recommandent 60 minutes d’activité physique modérée à vigoureuse chaque jour.
De même, moins de 20 % des enfants de trois et quatre ans et de dix à 16 ans respectent les Directives canadiennes en matière de comportement sédentaire à l’intention des enfants et des jeunes, qui recommandent que les plus jeunes ne passent pas plus d’une heure par jour devant un écran, et que les plus vieux n’y consacrent pas plus de deux heures par jour5. C’est important, car il a été démontré que les enfants qui passent plus de deux heures par jour devant un écran sont deux fois plus susceptibles de faire de l’embonpoint et d’être obèses que ceux qui y passent une heure ou moins.
Pour apporter des changements importants, il faudra probablement compter sur l’apport de multiples intervenants, qui viseront à responsabiliser les individus. Parmi ces interventions, soulignons, selon toute probabilité, l’augmentation des efforts d’éducation et de sensibilisation sur les conséquences de l’embonpoint et de l’obésité sur la santé et les maladies et la détermination de comportements sains qui assureront une protection contre l’obésité. Les intervenants importants doivent comprendre les Canadiens et les familles, les systèmes de santé, les écoles, les milieux de travail, l’industrie alimentaire et les gouvernements.
Il faudra explorer et implanter des stratégies préventives. Les politiques et les lois peuvent favoriser la formation de communautés et de milieux sains, mais doivent être sensibles aux coutumes et aux choix individuels. Ces politiques et ces lois ne doivent toutefois pas nuire aux populations vulnérables.
Il est important d’encourager des stratégies implantées dès la période néonatale. Par exemple, on pourrait envisager des programmes nationaux de soutien à l’allaitement, car l’allaitement a un effet protecteur sur l’embonpoint et l’obésité. Il faut se pencher sur les publicités sur les aliments et les boissons auprès des enfants, qui ont le potentiel de contribuer à l’obésité juvénile. On peut également envisager de mettre sur pied des programmes visant à accroître les taux d’activité physique et à améliorer l’accès aux installations récréatives communautaires. Par ailleurs, il est essentiel de lancer des campagnes d’éducation et de sensibilisation sociale pour diffuser un message fort et unifié à la population canadienne.
Il est essentiel de fixer des objectifs et de mettre en œuvre des programmes de surveillance pour examiner les répercussions des interventions. Les recherches continues sur les déterminants de l’apparition d’embonpoint et d’obésité et sur des solutions efficaces pour contrer ces déterminants méritent un soutien vigoureux.
La Société canadienne de pédiatrie partage l’espoir que des interventions soutenues, réfléchies et coopératives soient élaborées afin de réaliser l’objectif concret de réduire l’embonpoint et l’obésité, de même que le fardeau des maladies qui s’y associent, chez les jeunes canadiens.
Références
La Société canadienne de pédiatrie est propriétaire des droits d'auteur sur toute l'information publiée dans le présent blogue. Pour obtenir toute l'information à ce sujet, lisez la Politique sur les droits d'auteur.
L’information contenue dans le présent blogue ne devrait pas remplacer les soins et les conseils d’un médecin. Les points de vue des blogueurs ne représentent pas nécessairement ceux de la Société canadienne de pédiatrie.
Mise à jour : le 27 mai 2015