par Ruth Grimes, MD, FRCPC, présidente de la Société canadienne de pédiatrie
Il fait relativement chaud (-10 °C) à Winnipeg. Le ciel est dégagé et le drapeau ukrainien bleu et jaune désormais familier brille sur son mât sous le soleil de notre cour avant. Je l’ai acheté cette semaine, pour le hisser sous notre drapeau canadien.
Je suis au chaud et en sécurité, j’ai de la nourriture et un abri et j’ai la chance de savoir que mon mari et mes trois enfants adultes sont eux aussi en santé et en sécurité. Malgré ces certitudes, et bien d’autres, je ne me sens pas en confiance.
Je suis attristée, bouleversée, révoltée et anxieuse devant l’invasion de l’Ukraine – la terre natale de mon grand-père maternel – par la Russie.
« Pop », comme ma mère, mes tantes et mes oncles l’appelaient, est né à Lviv, en Galice, aujourd’hui l’Ukraine occidentale, et a émigré aux États-Unis en 1905. J’ai peur pour les nouvelles générations de la famille de mon grand-père qui habitent encore dans ce pays, et je chéris la culture et les traditions qui m’ont été transmises.
Je pense à un autre puissant pays qui a envahi et annexé des territoires qu’il se croyait autorisé à posséder, et à la guerre mondiale qui s’en est suivie. Mon père britannique, alors âgé de 18 ans, s’est enrôlé au début de la Seconde Guerre mondiale et a été blessé en France, en 1944. Après la guerre, il a fréquenté l’université et l’école de médecine, s’est exilé aux États-Unis pour étudier la pédiatrie et y a rencontré ma mère, elle-même résidente en pédiatrie.
Je me considère privilégiée de ne pas avoir été une enfant de la guerre, mais l’expérience de mes parents n’a pas été sans conséquences. Mon père ne m’a jamais vraiment parlé de la guerre, à part quelques anecdotes amusantes avec ses amis et une description très clinique du jour où il a été « soufflé » par une mine terrestre alors qu’il se déplaçait en véhicule blindé. C’était un modèle de douceur, de gentillesse, d’abnégation et de charité dans sa vie personnelle et professionnelle, et j’essaie de l’imiter encore à ce jour. Il était calme et discret, peut-être à l’image de l’Anglais flegmatique, mais il n’était jamais complaisant et s’est toujours intéressé à ce qui se passait dans le monde.
Ma mère, qui avait dix ans à la déclaration de la guerre et dont les trois frères ont combattu (l’un a été fait prisonnier après la bataille des Ardennes et un autre a participé à la libération de Bergen Belsen), s’est assurée de nous expliquer, à mes frères et moi, la haine religieuse et ethnique qui a motivé certains des pires événements de la Seconde Guerre mondiale. Nous avons constaté le coût physique et affectif de la guerre chez mes oncles et la famille qu’ils ont laissée derrière eux. Ma mère voulait que nous nous souvenions des effets de ces événements sur notre famille et sur le monde. Car qui oublie l’histoire se condamne à la revivre.
Nous ne pouvons pas faire preuve de complaisance devant la guerre qui fait rage en Ukraine et qui menace de déborder en Europe septentrionale et orientale. À titre de pédiatres, de médecins, de Canadiens, nous ne pouvons pas rester silencieux. Nous devons agir.
J’invite tous les membres de la SCP à soutenir l’aide humanitaire envers l’Ukraine. Pour ce faire, il est entre autres possible de passer par la Croix-Rouge canadienne, à qui le gouvernement fédéral remet des dons de contrepartie, ou par CARE (en anglais), qui priorise les familles, les femmes, les filles et les personnes âgées.
J’invite également les membres à consulter le site Web du gouvernement fédéral pour obtenir de l’information sur les sanctions canadiennes, le contrôle sur les exportations et l’action humanitaire. On y explique le contrôle sur les exportations de certains biens et technologies vers la Russie, mais pas du contrôle sur les importations. La Société canadienne de pédiatrie s’associera à l’Association médicale canadienne et à d’autres professions médicales à l’égard des enjeux liés aux importations russes.
J’encourage tous les membres de la SCP à soutenir les manifestations contre la guerre, de la manière qui leur semble la plus logique.
Je tiens également à vous rappeler que vos patients et leur famille pourraient avoir besoin de soutien en cette période troublée. Notre document destiné aux parents, intitulé Aider les enfants et les adolescents à affronter des événements publics stressants, peut être une ressource utile.
La Société canadienne de pédiatrie est solidaire du gouvernement du Canada qui appuie la souveraineté de l’Ukraine, de même que des organisations partenaires de pédiatrie qui continuent de revendiquer de l’aide humanitaire.
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L’information contenue dans le présent blogue ne devrait pas remplacer les soins et les conseils d’un médecin. Les points de vue des blogueurs ne représentent pas nécessairement ceux de la Société canadienne de pédiatrie.
Mise à jour : le 10 mai 2022