Document de principes
Affichage : le 24 octobre 2019
Lonnie Zwaigenbaum, Jessica A. Brian, Angie Ip; Société canadienne de pédiatrie, Groupe de travail des directives sur le trouble du spectre de l’autisme
Paediatr Child Health 2019 24(7):433–443.
Le trouble du spectre de l’autisme (TSA) est un trouble neurodéveloppemental permanent qui se caractérise par des déficits de la communication sociale, un mode répétitif et restreint des comportements et des sensibilités ou des intérêts sensoriels inhabituels. Le TSA a des répercussions importantes sur la vie des enfants et de leur famille. À l’heure actuelle, sa prévalence estimative est de un cas sur 66 enfants et adolescents canadiens dans le groupe d’âge des cinq à 17 ans. Les pédiatres généraux, les médecins de famille et les autres professionnels de la santé rencontrent donc plus d’enfants ayant un TSA qu’auparavant dans leur pratique. Le diagnostic rapide de ce trouble et l’orientation des cas vers des interventions comportementales et éducationnelles intensives dès le plus jeune âge peuvent favoriser un meilleur pronostic clinique à long terme grâce à la neuroplasticité du cerveau à un plus jeune âge. Le présent document de principes contient des recommandations et des outils clairs, détaillés et fondés sur des données probantes pour aider les pédiatres communautaires et les autres dispensateurs de soins de première ligne à surveiller les tout premiers signes de TSA, ce qui constitue une étape importante vers un diagnostic précis et une évaluation détaillée des besoins pour planifier les interventions.
Mots-clés : Autism spectrum disorder; Developmental surveillance; Early identification; Screening
Le trouble du spectre de l’autisme (TSA), qui est d’origine neurodéveloppementale et se manifeste dans la petite enfance, est lié à un vaste éventail de symptômes et divers degrés de capacités. Comme le définit la cinquième édition du Manuel diagnostique et statistiques des troubles mentaux (DSM-5) [1], le TSA est une catégorie diagnostique globale qui inclut deux domaines de symptômes : 1) les déficits de la communication sociale et 2) des modes restreints et répétitifs des comportements et des intérêts. Les autres critères diagnostiques du TSA qui figurent dans le DSM-5 sont résumés au tableau 1.
Tableau 1. Critères diagnostiques du trouble du spectre de l’autisme établis par le DSM-5 | |
Domaines | Critères (et exemples) |
1. Déficits de la communication et des interactions sociales (les trois critères doivent être observés) |
Réciprocité sociale et émotionnelle
Déficits des comportements de communication non verbaux
Incapacité d’établir ou d’entretenir une relation
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2. Caractère restreint et répétitif des comportements, des intérêts et des activités (deux des quatre critères doivent être observés) |
Caractère stéréotypé du langage et du comportement
Intolérance ou résistance au changement
Intérêts restreints et fixes
Hyperréactivité ou hyporéactivité aux stimulations sensorielles
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3. Les signes ou symptômes doivent être présents dès les étapes précoces du développement, mais ne sont pas nécessairement pleinement manifestes avant que les demandes sociales n’excèdent les capacités limitées, ou ils peuvent être masqués plus tard par des stratégies apprises. | |
4. Les symptômes perturbent le fonctionnement quotidien. | |
5. Les symptômes ne sont pas mieux expliqués par un handicap intellectuel ou un retard global du développement. | |
6. Le TSA peut être associé ou non à des troubles médicaux, génétiques, neurodéveloppementaux, mentaux ou comportementaux ou à un déficit intellectuel ou une altération du langage | |
7. Le niveau de gravité de chacun des deux domaines peut contribuer à préciser le diagnostic : niveau 1 : nécessitant de l’aide; niveau 2 : nécessitant une aide importante; niveau 3 : nécessitant une aide très importante. Ces niveaux peuvent être difficiles à établir au moment du diagnostic de très jeunes enfants. | |
Données adaptées de la référence [1] TSA trouble du spectre de l’autisme |
La prévalence de TSA a augmenté, passant d’un nombre estimatif d’un cas sur 1 000 enfants en Nouvelle-Écosse il y a 30 ans [2] à une estimation actuelle d’un cas sur 66 enfants et adolescents canadiens dans le groupe d’âge des cinq à 17 ans (un cas sur 42 garçons et sur 165 filles) [3]. On ne sait pas encore à quel point cette augmentation de la prévalence de TSA est attribuable à une réelle hausse des cas. L’amélioration du dépistage et du diagnostic et l’élargissement des critères dans les versions successives du DSM contribuent probablement aux modifications de la prévalence estimative [4]. Selon les données probantes, on peut diagnostiquer le TSA avec fiabilité avant l’âge de deux ans chez certains enfants [5], mais il peut falloir plus de temps avant que les cas plus discrets se présentent pleinement. Malgré une meilleure connaissance des signes précoces, l’âge moyen du diagnostic se situe toujours entre quatre et cinq ans [6]. Les garçons reçoivent un diagnostic de TSA quatre fois plus que les filles [4][5], mais il se peut que l’écart entre les sexes se rétrécisse. On s’aperçoit de plus en plus que certaines filles présentent des signes plus discrets que les garçons [7]–[9].
On ne comprend pas pleinement l’étiologie du TSA, mais d’après les observations récentes, il y aurait une interaction entre les facteurs génétiques, épigénétiques et environnementaux [10]. Le sexe masculin et les antécédents familiaux font partie des facteurs de risque importants de TSA. Le risque de récurrence chez les jeunes frères et sœurs d’un enfant ayant un TSA se situerait entre 7 % et 19 % [11][12], par rapport à 1,5 % dans la population générale [4]. La récurrence varie selon le degré de parenté. Dans une récente étude suédoise, le risque relatif est décuplé lorsqu’un membre de la fratrie directe a un diagnostic de TSA, mais doublé lorsqu’un cousin est touché [13]. Les autres facteurs de risque sont résumés au tableau 2 [10]–[19]. Les mécanismes entre l’exposition environnementale et le TSA peuvent inclure l’inflammation, le stress oxydatif ou la perturbation endocrinienne et être influencés par les effets liés aux gènes [15][16].
On ne constate généralement pas de signes comportementaux évidents de TSA avant l’âge de six mois. Selon les études prospectives auprès de nourrissons à haut risque, un prodrome de TSA émerge pendant le deuxième semestre suivant la naissance, ce qui peut inclure un contrôle moteur tardif (p. ex., tête qui continue à basculer vers l’arrière), des troubles de l’alimentation et du sommeil ou une réactivité ou une passivité excessive [20][21].
Les symptômes des domaines centraux du TSA se manifestent généralement entre l’âge de 12 et 24 mois. Les présentations initiales varient et aucun signe comportemental ne peut confirmer ou infirmer un diagnostic de TSA. Les premières inquiétudes des parents peuvent comprendre un retard de langage, l’absence de réponse de l’enfant lorsqu’on l’appelle par son nom et un contact visuel limité.
Les autres signes évocateurs précoces à diverses étapes du développement sont résumés au tableau 3 [20]–[24]. Les enfants ayant un TSA peuvent sembler relativement neurotypiques pour ce qui est de leur participation et de leur communication sociale, puis devenir renfermés ou présenter une régression de leurs capacités de communication ou de langage à l’âge de 18 mois [22]. Chez certains enfants aux capacités langagières et cognitives plus avancées, les signes de TSA sont relativement discrets pendant la petite enfance, mais deviennent plus apparents à l’âge scolaire, lorsqu’ils commencent à éprouver des difficultés devant les exigences sociales croissantes [20]–[23].
Tableau 2. Les facteurs de risque de trouble du spectre de l’autisme | |
Catégories | Facteurs de risque |
Génétique ou familial |
Syndromes génétiques spécifiques et variantes du risque Sexe masculin Parent du premier degré ayant un TSA ou autre antécédent familial de TSA |
Prénatale |
Parents plus âgés (≥35 ans) Obésité, diabète ou hypertension de la mère Exposition in utero au valproate, aux pesticides ou à la pollution de l’air liée à la circulation routière Infections de la mère (p. ex., rubéole) Grossesses très rapprochées (<12 mois) |
Postnatale |
Petit poids à la naissance Extrême prématurité |
Données tirées des références [10] à [19] TSA trouble du spectre de l’autisme |
La surveillance du développement est un processus flexible par lequel des cliniciens avertis rassemblent de l’information pertinente provenant de multiples sources (y compris les parents et l’observation directe) au fil du temps afin de déterminer les inquiétudes en matière de développement, y compris celles liées au TSA, et d’y répondre [25]. La Société canadienne de pédiatrie (SCP) [26] et d’autres organisations professionnelles [27]–[38] recommandent la surveillance du développement à chaque bilan de santé planifié (qu’on appelle aussi visite de santé périodique) et chaque fois qu’un parent ou qu’une personne qui s’occupe de l’enfant soulève des inquiétudes au sujet du développement du langage ou d’autres capacités de l’enfant. La surveillance du développement inclut l’intégration de l’information obtenue à partir des questions sur les inquiétudes des parents et des observations cliniques, lesquelles englobent, dans la mesure du possible, des mesures standardisées (p. ex., questionnaires des parents) pour éclairer l’impression clinique et la prise de décision.
Le dépistage du développement consiste à procéder à une brève évaluation au moyen d’une mesure standardisée pour dépister les enfants plus vulnérables à un retard ou à un trouble. Les outils de dépistage varient selon la forme (p. ex., le compte rendu du parent plutôt qu’une évaluation directe de l’enfant) et la portée (le dépistage « à large spectre » couvre de multiples aspects du développement, par opposition à celui qui est propre à un domaine ou à un trouble). Le dépistage du développement varie également selon la population ciblée. Le dépistage systématique vise tous les enfants, quel que soit le degré d’inquiétude, tandis que le dépistage ciblé vise une sous-population en fonction de facteurs présélectionnés.
Au tableau 4 sont résumés le groupe d’âge, la durée d’exécution du questionnaire, les caractéristiques de classification (sensibilité et spécificité) et le rendement de certains tests de dépistage du développement à large spectre [39]–[44]. Le tableau 5 présente des données similaires à l’égard de mesures visant à dépister les enfants vulnérables au TSA. Le dépistage inclut un critère de cotation, selon lequel les enfants qui obtiennent un score supérieur à un seuil préétabli sont classés comme plus à risque (dépistage « positif »). Les cliniciens peuvent recourir à leur jugement clinique lorsqu’ils envisagent de diriger l’enfant vers une évaluation plus approfondie, même lorsque son score au dépistage est « négatif ». Pour ce faire, il peut tenir compte de ses observations cliniques, des inquiétudes des parents et d’autres facteurs évocateurs, comme les antécédents familiaux.
Plusieurs analyses détaillées ont permis d’évaluer les mesures utilisées pour dépister le TSA, particulièrement pour en déterminer l’exactitude auprès de populations particulières et dans des contextes donnés, ainsi que pour examiner les données probantes confirmant (ou infirmant) leurs effets sur l’âge du diagnostic, l’accès aux services d’intervention et le pronostic à long terme [21][23][45]–[47]. Dans les directives antérieures sur l’évaluation du TSA [28][31][35] et le US Preventative Services Task Force (USPSTF) [48], on a également passé en revue les données probantes sur le dépistage du TSA.
Il est possible de tirer plusieurs conclusions de ces analyses. En premier lieu, les outils de dépistage du TSA ont été évalués dans des contextes communautaires (p. ex., en pédiatrie de première ligne) qui permettent de distinguer avec précision les toutpetits ayant ou non un TSA (voir le tableau 4). En deuxième lieu, par rapport à une question ouverte sur les inquiétudes des parents, certains outils de dépistage (p. ex., l’outil M-CHAT et la grille de développement de la communication chez le jeune enfant en bas âge (ITC)) permettent de dépister le TSA plus tôt et de manière plus constante [49][50]. En troisième lieu, les essais cliniques contiennent peu de données probantes démontrant l’influence des outils de dépistage du TSA sur l’échéancier diagnostique et le pronostic à long terme. Un essai aléatoire et contrôlé (EAC) a établi que le dépistage précoce de l’autisme chez les tout-petits [51] s’associait à un plus jeune âge au diagnostic, mais cette différence était peut-être le reflet d’effets collatéraux (p. ex., participation des médecins communautaires) plutôt que du dépistage lui-même [52]. L’USPSTF citait l’absence de données probantes tirées des essais cliniques devant des données insuffisantes pour soupeser les avantages et les inconvénients du dépistage du TSA chez les jeunes enfants à l’égard de qui ni les parents ni un clinicien ne s’inquiétaients [48].
Dans une récente étude faisant appel à des modèles de simulation, le dépistage systématique du TSA n’accélérait ni le diagnostic ni le traitement au sein du système de santé canadien [53]. Au moment de rédiger le présent document, les retombées du dépistage ciblé du TSA n’avait pas été validées par des essais cliniques. Cependant, selon certaines données probantes, le dépistage du TSA permettrait de réduire les inégalités sociales en matière d’accès à des services spécialisés [54][55]. Plusieurs auteurs [56]–[58] contestent que la prépondérance des preuves puisse justifier l’exclusion du dépistage de la pratique actuelle. Il reste à déterminer si des listes standardisées de symptômes du TSA comportent des avantages potentiels par rapport à des questions ouvertes sur les inquiétudes des parents.
Les recommandations suivantes visent à optimiser le diagnostic rapide du TSA et l’accès aux interventions, deux objectifs dont les effets positifs sur le pronostic sont démontrés. Elles favorisent également une utilisation responsable et efficiente des ressources de santé, sans oublier de tenir compte des risques de classifications erronées (le dépistage tardif des enfants ayant un TSA et un dépistage inapproprié des enfants sans TSA).
Tableau 3. Signes évocateurs précoces chez les enfants à risque de trouble du spectre de l’autisme | |
Âge | Présentation clinique |
De 6 à 12 mois |
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De 9 à 12 mois |
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De 12 à 18 mois |
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De 15 à 24 mois |
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Tout âge |
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Tout âge |
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Données traduites des références [20] à [24] TSA trouble du spectre de l’autisme |
Tableau 4. Outils d’évaluation du développement général | |||||
Questionnaires aux parents (à acheter, à moins d’un avis contraire) | |||||
Outil de dépistage |
Groupe d’âge |
Durée d’exécution |
Rendement |
Échantillon |
Commentaires |
Questionnaires sur les étapes du développement (ASQ-3) [40] |
De 1 mois à 5,5 ans |
De 10 à 15 minutes |
Se : de 70 % à 90 % [40] Sp : de 76 % à 91 % |
Enfants de diverses origines ethniques et socioéconomiques |
Motricité globale et fine, fonctions du langage, développement socioaffectif, capacités adaptatives |
Inventaire du développement de l’enfant (CDI) [41] |
De 15 mois à 6 ans |
De 30 à 40 minutes |
Se : de 80 % à 100 % [41] Sp : de 94 % à 96 % |
Enfants surtout blancs et de milieu ouvrier |
300 points : huit aspects du fonctionnement, y compris la cognition et le langage |
Brief Early Childhood Screening Assessment (ECSA) [42] |
De 18 à 60 mois |
De 1 à 5 minutes |
Se : 89 % [42] Sp : 85 % |
Enfants en soins de première ligne |
22 points : évaluation du développement affectif et comportemental (gratuit) |
Questionnaire de dépistage du district de Nipissing [43], devenu la Liste de vérification Looksee |
De 1 mois à 6 ans |
5 minutes |
Se : de 29 % à 68 % [43] Sp : de 58 % à 88 % |
Groupe dirigé vers une clinique à haut risque |
Couramment utilisé en Ontario. Évaluation de 13 étapes du développement (gratuit en Ontario) |
PEDS : Un outil de dépistage développemental [44] |
De la naissance à 8 ans |
De 2 à 10 minutes |
Se : de 91 % à 97 % [44] Sp : de 73 % à 86 % |
Enfants de diverses origines ethniques et socioéconomiques |
Langage expressif et réceptif et articulation; motricité globale, autonomie, développement socioaffectif, comportemental et global; cognition |
Se sensibilité; Sp spécificité. |
Tableau 5. Mesures des premiers symptômes de trouble du spectre de l’autisme, couramment utilisées et fondées sur des données probantes | |||||
Outil de dépistage |
Groupe d’âge |
Durée d’exécution |
Rendement |
Échantillon |
Description |
Questionnaires (parents, enseignants) | |||||
Modified Checklist for Autism in Toddlers, Revised with Follow-up (M-CHAT-R/F), en français [30][62] |
De 16 à 30 mois |
De 5 à 10 minutes |
Se : 85 % [62] Sp : de 91 % à 99 % VPP : 48 % pour le TSA [20] VPP : 95 % pour tout RD [23] |
Tout-petits à faible risque faisant l’objet d’un dépistage lors du bilan de santé de l’enfant à 18 et 24 mois |
Deux étapes : rapport en 20 points et entrevue de suivi (de 5 à 10 minutes). Évaluation du pointage protodéclaratif, réponse au nom, intérêt envers les camarades, présentation d’objets d’intérêt aux parents, imitation (gratuit) |
Grille de développement de la communication chez le jeune enfant en bas âge (ITC) [47][50][62] |
De 8 à 24 mois |
De 5 à 10 minutes |
Sp : 83 % VPP : de 71 % à 79 % VPN : de 88 % à 99 % |
Tout-petits de 9 à 24 mois provenant de la population générale |
24 points : Évaluation des gestes, du contact visuel, des expressions faciales, des vocalisations (gratuit) |
Échelle de réciprocité sociale – 2e édition – préscolaire (SRS-2 – préscolaire) [30][63] |
De 2,5 à 4,5 ans |
De 15 à 20 minutes |
Se : de 75 % à 78 % Sp : de 67 % à 96 % |
442 enfants ayant ou un non un TSA |
65 points : mesure de la conscience sociale, de la communication sociale réciproque, de l’anxiété sociale, des traits autistiques et préoccupations de type autistique |
Autism Spectrum Rating Scales* [64] |
De 2 à 15 ans |
De 5 à 20 minutes |
Se : 92 % [64] Sp : 89 % VPP : 91 % VPN : 89 % |
2 560 enfants d’un échantillon normatif |
70 points : évaluation des comportements sociaux et de la communication, de l’autorégulation; version courte disponible (15 points, de 2 à 15 ans) |
Outil clinique interactif | |||||
Outil de dépistage |
Groupe d’âge |
Durée d’exécution |
Propriétés psychométriques |
Échantillon |
Description |
Screening Tool for Autism in Two-Year- Olds* (STAT) [65] |
De 24 à 36 mois |
20 minutes |
Se : de 92 % à 95 % [65] Sp : de 73 % à 85 % VPP : 56 % VPN : 97 % |
71 enfants dont un frère ou une sœur plus âgé a un TSA ou envoyés en consultation à cause d’une crainte de TSA |
Évaluation de la communication et des comportements sociaux; 12 activités observées pendant des séances de jeu de 20 minutes |
Rapid Interactive Screening Test for Autism in Toddlers* (RITA-T) [66] |
De 18 à 36 mois |
10 minutes |
Se : 100 % [66] Sp : 84 % VPP : 88 % |
61 tout-petits d’une clinique de petite enfance |
Distinction entre les tout-petits ayant un TSA et ceux ayant un RD, mais pas de TSA |
*Formation requise RD retard de développement; Se sensibilité; Sp spécificité; TSA trouble du spectre de l’autisme; VPP valeur prédictive positive; VPN valeur prédictive négative |
La surveillance générale du développement de tous les enfants canadiens devrait inclure un suivi des signes comportementaux précoces du trouble du spectre de l’autisme
Les pédiatres, les médecins de famille et les autres professionnels de la santé doivent connaître les caractéristiques comportementales précoces du TSA (voir le tableau 3) et, à chaque rendez-vous en cabinet, s’informer auprès des parents s’ils ont des inquiétudes à l’égard du développement de leur enfant. Dans un document de principes antérieur, la SCP a recommandé de procéder à l’évaluation du développement et à l’enseignement aux parents dans le cadre du bilan de santé amélioré à 18 mois, un moment crucial où les signes et symptômes de TSA commencent souvent à se manifester [26].
La surveillance du développement comprend la collecte d’information auprès des parents et des autres personnes qui s’occupent de l’enfant (p. ex., les grands-parents, les éducateurs en milieu de garde ou les animateurs de groupes de toutpetits) quant à leurs inquiétudes à l’égard du développement de celui-ci. Si on se fie uniquement aux questions ouvertes, on risque de sous-dépister les enfants présentant des retards ou des troubles. Les dispensateurs de soins pédiatriques peuvent utiliser le Relevé postnatal Rourke (RPR) pour consigner les observations relatives au développement global, à l’examen physique, à la vaccination, à l’alimentation et à d’autres étapes du développement [59].
Les dispensateurs de soins peuvent également intégrer des mesures à large spectre pour standardiser l’information sur le développement (tableau 4) dans leur pratique au quotidien. Cependant, puisque les essais aléatoires et contrôlés n’ont pas encore démontré que le dépistage systématique du développement des enfants n’ayant pas de risque préétabli améliore le pronostic, le Groupe d’étude canadien sur les soins de santé préventifs a conclu que les données probantes sont insuffisantes pour le recommander [20][60].
Il est important de souligner que les spécifités de l’enfant peuvent avoir une influence sur le moment où l’on constate ses premières caractéristiques comportementales et où on les distingue clairement. Par exemple, les enfants dont les symptômes sont moins envahissants et dont le développement est plus avancé ont tendance à être diagnostiqués plus tardivement [6]. Ainsi, la surveillance des caractéristiques comportementales du TSA doit se poursuivre tout au long de l’enfance.
Les enfants considérés comme à plus haut risque de trouble du spectre de l’autisme devraient rapidement faire l’objet d’une évaluation ciblée pour déterminer s’ils ont besoin d’une évaluation diagnostique plus approfondie
Lorsque la surveillance du développement indique un risque possible de TSA, il faut procéder à une évaluation plus approfondie. Il faut faire preuve de vigilance auprès des enfants ayant des facteurs de risque connus (tableau 2), car ils présentent une prévalence globale de TSA plus élevée. Cette étape de l’évaluation axée sur le TSA doit inclure une mesure standardisée des symptômes de TSA (tableau 5) [20][23][30][47][50][61]–[65]. Le clinicien peut utiliser un questionnaire pour les parents (p. ex., M-CHAT-R/F ou ITC) ou, dans les milieux disposant de personnel formé, un outil interactif (p. ex., STAT). De l’information détaillée sur la symptomatologie complète les observations parentales et cliniques et contribue à orienter les étapes suivantes.
Les enfants qui répondent aux critères de cotation en fonction d'une mesure standardisée des symptômes de TSA ou dont la présentation clinique soulève un fort indice de suspicion de la part du professionnel de la santé, doivent faire l’objet d’une évaluation diagnostique effectuée par un pédiatre communautaire ou une équipe spécialisée (voir la figure 1 et le document de principes complémentaire, intitulé Les normes d’évaluation diagnostique du trouble du spectre de l’autisme, qui est également publié dans le présent numéro). Dans l’attente d’une évaluation diagnostique, les enfants à risque doivent également être orientés immédiatement vers des services d’intervention précoce (p. ex., développement du nourrisson, orthophonie, ergothérapie, appui préscolaire ciblé), en fonction du degré de besoin et du modèle de service local.
Pour s’assurer que l’évaluation diagnostique du TSA est opportune, précise et efficace, une trajectoire clinique flexible est proposée. Cette approche dépend de la complexité de la présentation clinique de l’enfant, de l’expérience personnelle et du jugement clinique du dispensateur de soins, ainsi que de l’accessibilité et de la portée des ressources de santé locales (figure 1). Un dispensateur de soins pédiatriques peut choisir de s’appuyer sur les critères du DSM-5 et sur son jugement clinique pour poser ou écarter un diagnostic de TSA ou de collaborer avec un autre professionnel (p. ex., spécialiste ou surspécialiste en pédiatrie ou pédopsychologue) pour confirmer un diagnostic (modèle de partage des soins).
Lorsque la présentation de l’enfant est compliquée par des inquiétudes concomitantes ou par une histoire médicale ou psychosociale complexe, le praticien communautaire peut orienter l’enfant vers une équipe d’experts. Il faut alors aviser les parents que leur enfant sera dirigé vers des interventions communautaires de soutien (tels que l’orthophonie, l’ergothérapie ou un programme préscolaire) qu’il recevra en attendant une évaluation diagnostique et qu’il poursuivra par la suite.
Pour connaître les autres étapes cliniques à prendre ou à amorcer avant l’obtention d’un diagnostic officiel, voir le document complémentaire intitulé Les normes d’évaluation diagnostique du TSA, publié dans le présent numéro.
Lorsque la surveillance du trouble du spectre de l’autisme ne justifie pas d’approfondir l’évaluation diagnostique, mais que d’autres inquiétudes demeurent en matière de développement, prendre les mesures suivantes :
Comment se préparer au premier rendez-vous en cabinet d’un enfant chez qui on soupçonne un trouble du spectre de l’autisme [66][67]
Ressources recommandées
Financement : La production de ces lignes directrices a été rendue possible grâce du financement de l’Agence de la santé publique du Canada. Les points de vue exprimés ne reflètent pas nécessairement ceux de l’Agence de la santé publique du Canada.
Conflits d’intérêts potentiels : Le docteur Zwaigenbaum déclare recevoir des honoraires personnels du Comité indépendant de contrôle des données de Roche, hors du contexte du présent manuscrit. Il n’y a pas d’autres divulgations de conflits d’intérêts. Tous les auteurs ont soumis le formulaire de divulgation de conflits d’intérêts potentiels de l’International Committee of Medical Journal Editors. Les conflits que les directeurs de rédaction jugent pertinents dans le cadre du présent manuscrit sont indiqués.
Membres : Mark Awuku MD (section de la pédiatrie communautaire de la SCP), Jessica Brian Ph. D. (coprésidente), Susan Cosgrove, Pam Green IP, Elizabeth Grier MD (Le Collège des médecins de famille du Canada), Sophia Hrycko MD (Académie canadienne de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent), Angie Ip MD, James Irvine MD, Anne Kawamura MD (section de la pédiatrie du développement de la SCP), Sheila Laredo MD Ph. D. (Alliance canadienne du trouble du spectre de l’autisme), William Mahoney MD (section de la santé mentale de la SCP), Patricia Parkin MD, Melanie Penner MD, Mandy Schwartz MD, Isabel Smith Ph. D., Lonnie Zwaigenbaum MD (coprésident)
Auteurs principaux : Lonnie Zwaigenbaum MD, Jessica A. Brian Ph. D., Angie Ip MD
Avertissement : Les recommandations du présent document de principes ne constituent pas une démarche ou un mode de traitement exclusif. Des variations tenant compte de la situation du patient peuvent se révéler pertinentes. Les adresses Internet sont à jour au moment de la publication.
Mise à jour : le 7 février 2024