Document de principes
Affichage : le 13 avril 2022
Alene Toulany, Jan Willem Gorter, Megan E. Harrison; Société canadienne de pédiatrie, Comité de la santé de l’adolescent
Paediatr Child Health 2022 27(5):303–309.
Les jeunes qui ont des besoins de santé complexes, définis comme ceux qui nécessitent des soins et services spécialisés en raison d’affections physiques, développementales ou mentales, sont souvent traités par des pédiatres et autres spécialistes en pédiatrie. Au Canada, l’âge auquel les bailleurs de fonds provinciaux et territoriaux exigent le transfert des soins pédiatriques aux soins pour adultes varie entre 16 et 19 ans. La délimitation actuelle entre les services de santé pédiatriques et aux adultes est fragmentaire, ce qui entrave la continuité des soins pendant une période déjà vulnérable du développement. Le peu d’intégration des soins entre les domaines peut nuire à l’engagement des jeunes en matière de santé et compromettre leur santé à l’âge adulte. Pour renverser ces obstacles et améliorer les résultats de la transition, les dispensateurs de soins pédiatriques et de soins aux adultes, de même que les médecins de famille et d’autres partenaires communautaires, doivent collaborer de manière satisfaisante à l’élaboration de stratégies systémiques qui rationalisent et préservent les soins aux jeunes en transition vers des soins aux adultes en milieu tertiaire, communautaire et primaire. Il est recommandé de privilégier des limites d’âge flexibles pour effectuer cette transition vers les soins aux adultes et de tenir compte de la phase de développement et de l’aptitude de chaque jeune, ainsi que des besoins et de la situation de chaque patient et de chaque famille. Une formation et un enseignement spécialisés sur les enjeux liés aux soins de transition s’imposent pour renforcer les capacités et s’assurer que les professionnels de la santé des diverses disciplines et des divers milieux soient mieux outillés pour accepter et traiter les jeunes qui ont des besoins de santé complexes.
Mots-clés : adolescent; jeune; jeune adulte; maladie chronique; problèmes médicaux complexes; soins aux adultes; transfert; transition
La transition désigne le processus réfléchi et planifié du passage des services de soins pédiatriques aux services de soins aux adultes à compter de l’adolescence jusqu’au début de l’âge adulte [1]. Le transfert est un événement ponctuel du processus de transition, lorsque la responsabilité des soins passe officiellement du professionnel de la santé ou de l’équipe soignante pédiatrique à un professionnel ou une équipe pour adultes. Les principes fondamentaux de la planification de la transition sont résumés dans le tableau 1 et incluent les éléments suivants : 1) amorcer la planification de la transition tôt; 2) créer un plan de transition personnalisé; 3) offrir un soutien avant la transition et 4) s’assurer d’un soutien continu après la transition vers les soins aux adultes. Il est avantageux de nommer un « porte-parole » désigné de la transition, c’est-à-dire un clinicien responsable de faciliter et de coordonner le travail des professionnels de la santé qui participent aux soins du jeune, y compris en première ligne, et qui s’assurent d’une communication efficace tout au long du processus [2]. Les objectifs primordiaux des soins pendant la transition consistent à accroître le niveau de responsabilité du jeune dans la prise en charge de ses soins et à s’assurer qu’il comprenne mieux les affections dont il est atteint et acquière les habiletés nécessaires pour s’y retrouver dans le système de soins aux adultes [3]. Au Canada, l’âge du transfert des services de soins pédiatriques aux soins aux adultes est fixé entre 16 et 19 ans.
Tableau 1. Quatre éléments essentiels d’une transition réussie
L’approche de chacun des quatre éléments doit être axée sur les jeunes, reposer sur les forces et adaptée au développement. |
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1. Amorcer la planification de la transition tôt |
Évaluer régulièrement la préparation à la transition, à la fois auprès du patient et des proches. S’assurer de consacrer assez de temps à la coordination d’une transition réussie. Comprendre le potentiel de chaque jeune et ses objectifs en matière d’activités, d’éducation, de loisirs et d’emploi. |
2. Créer un plan de transition personnalisé |
Nommer un porte-parole de la transition. Faire participer des cliniciens clés de diverses disciplines, dans la mesure du possible, de même que ceux des soins primaires. Solliciter l’avis du jeune et de ses parents sur leurs besoins de santé. Corriger les lacunes sur le plan de la préparation, de l’autonomie et de la confiance du jeune. |
3. Offrir un soutien avant la transition |
Éduquer le jeune et ses proches et leur proposer un groupe d’entraide. Soutenir le jeune par une approche graduelle de l’autonomie dans la prise en charge des soins. Créer un résumé complet du transfert des soins en fonction des priorités du jeune et de ses proches. Le remettre au jeune et aux cliniciens. |
4. S’assurer d’un soutien continu après la transition vers les soins aux adultes |
S’assurer que le jeune se rend à ses rendez-vous. Évaluer le lien de chaque jeune avec les services pour adultes. Continuer de faire participer les proches conformément aux souhaits du jeune, et réduire graduellement cette participation au fil du temps. Mesurer systématiquement les résultats. |
Les jeunes qui ont des besoins de santé complexes englobent à la fois ceux qui présentent des affections en santé physique, développementale ou mentale et ceux qui ont des problèmes médicaux complexes [4]. La complexité des soins, les besoins de santé et le nombre d’enfants qui ont des besoins de santé complexes augmentent au Canada, en grande partie grâce aux progrès thérapeutiques à l’égard de nombreuses affections infantiles [5][6]. Les enfants et les adolescents qui ont des problèmes médicaux complexes possèdent plusieurs caractéristiques en commun, y compris des affections chroniques et souvent graves, des limites fonctionnelles qui les obligent fréquemment à dépendre de la technologie et une utilisation élevée des services de santé [6]. Dans bien des cas, les jeunes qui ont des besoins de santé complexes doivent être soumis à une surveillance continue de leur santé et de leurs soins pour conserver une santé optimale à l’âge adulte [7].
La transition des jeunes qui ont des besoins de santé complexes vers les soins aux adultes dépasse largement le simple transfert médical et entraîne des enjeux importants pour les jeunes, les proches et les cliniciens qui participent à leurs soins [8]-[13]. Les publications témoignent d’une santé insatisfaisante après la transition de plusieurs populations ayant des besoins de santé complexes. Certains problèmes de santé ont fait l’objet d’un plus grand nombre de recherches sur la transition, soit le diabète [13]-[16], la fibrose kystique [17]-[19], les cardiopathies congénitales [20][21] et les transplantations rénales ou d’autres organes [22][23]. Par exemple, dans des études réalisées auprès de la population ontarienne, le taux d’hospitalisations liées au diabète augmentait considérablement dans les deux ans suivant le transfert aux soins aux adultes, passant de 7,6 à 9,5 cas sur 100 patients-années [24], et près de la moitié des jeunes Ontariens ne recevaient pas de soins du diabète pendant plus de 12 mois au cours de leur transition vers les soins aux adultes [25].
La dégradation de l’état de santé peut également être compliquée par les changements physiques, psychosociaux et développementaux, nombreux et complexes, qui accompagnent l’adolescence et le début de l’âge adulte. Les jeunes ont souvent besoin de soutien pour acquérir des habiletés de prise en charge, s’y retrouver dans les nouveaux systèmes de soins et leurs nouvelles relations et s’adapter aux changements en matière de logement, d’emploi, d’éducation et de vie personnelle. Les jeunes n’accordent peut-être pas la même priorité à leur santé qu’à d’autres secteurs de transition de leur vie. De plus, les problèmes physiques chroniques sont associés à des symptômes dépressifs plus marqués chez les jeunes adultes [26]. Toutes ces adaptations peuvent contribuer au désengagement des patients, à leur peu d’adhésion aux traitements, à l’augmentation des hospitalisations ou des consultations à l’urgence et à une mauvaise santé globale [27]-[31]. Par ailleurs, les expériences désagréables de la transition s’ajoutent au fardeau et à la détresse des proches ou des familles [32][33]. La famille ou les proches de nombreux jeunes qui ont des problèmes médicaux complexes et des incapacités du développement continuent de jouer un rôle de de soutien de premier plan pendant et après leur transition vers les soins pour adultes, particulièrement si ces jeunes ne sont pas aptes à consentir ou à prendre des décisions en matière de santé [34]. Malgré toutes ces difficultés, dans le cadre des politiques de santé et des politiques sociales plus vastes, peu de régions sociosanitaires du Canada se sont suffisamment penchées sur les enjeux relatifs aux soins transitionnels [35].
Peu de données probantes appuient une intervention efficace unique pour favoriser la transition des jeunes ayant une maladie ou incapacité chronique ou de ceux qui présentent des affections multiples (p. ex., une affection physique et mentale). Les interventions sont souvent axées sur une maladie ou un organe en particulier et sur la transition d’un spécialiste à l’autre, ne tiennent pas compte particulièrement des patients ayant des problèmes médicaux complexes ou dépendants des technologies et n’établissent pas clairement les approches les plus efficaces pour assurer une belle transition [36]-[38]. Parmi les stratégies courantes, soulignons l’éducation du patient et des proches, les ressources pour revenir sur l’information transmise, des intervenants pivots ou coordonnateurs des soins, et des cliniques pédiatriques et pour adultes conjointes [39]-[44]. Par ailleurs, il manque de modèles psychosociaux élargis pour mieux orienter les processus de transition dans les divers contextes de santé. De plus, on connaît très peu l’importance et le rôle des dispensateurs de soins primaires dans le soutien à la transition des jeunes qui ont des besoins de santé complexes [45]-[47]. Le peu de données probantes pour orienter les pratiques et politiques cliniques entourant le rôle des dispensateurs de soins primaires lors de la transition des jeunes qui ont des besoins de santé complexes, y compris la maladie mentale, pose problème. En partie, ce manque de données probantes reflète la fragmentation de l’interface entre les soins primaires et les soins spécialisés, de même que les priorités que le milieu pédiatrique avait l’habitude d’accorder à la transition. Les interventions liées à la transition doivent être soigneusement adaptées, planifiées et intégrées à l’ensemble du système de santé pour avoir des conséquences constructives et positives sur les résultats.
L’adolescence est une période d’importants changements biologiques, de croissance accélérée et de transitions majeures des rôles. La conceptualisation et la définition de cette période formative influent sur la portée et l’objectif des lois, des politiques et des programmes visant à protéger et à responsabiliser les adolescents [48]. Par exemple, la tranche d’âge de l’adolescence n’est pas bien définie [49] et se caractérise par d’importantes variations individuelles sur le plan du développement. Certains experts avancent que l’adolescence devrait être redéfinie pour inclure les jeunes de dix à 24 ans, afin d’être plus fidèle aux profils de croissance actuels chez les adolescents, à une meilleure compréhension du développement neurologique et au moment de la transition des rôles [48]. En effet, des limites d’âge plus flexibles pour circonscrire la transition aux soins pour adultes refléteraient mieux l’âge développemental et la préparation du jeune que l’âge chronologique ou d’autres définitions de l’adolescence [48]-[50]. Selon ce modèle, les jeunes assumeraient de plus en plus de responsabilités et recevraient de plus en plus d’information à mesure qu’ils traverseraient, à leur rythme, les phases de développement qui correspondent à l’adolescence.
Au Canada, il n’y a pas d’âge de consentement légal et universel pour prendre des décisions en matière de santé [51]. Les professionnels de la santé sont tenus de procéder aux évaluations d’après la conscience de soi émergente du patient, ses valeurs et ses croyances en développement et ses habiletés cognitives en évolution. En fait, l’aptitude de chaque patient pédiatrique à consentir à un traitement donné peut varier selon son âge, sa situation et son cas particulier (des variations légales peuvent s’ajouter selon les régions sociosanitaires). Cette approche respecte la notion des « capacités évolutives » énoncée dans la Convention des Nations Unies relative aux droits de l’enfant, selon laquelle les enfants acquièrent des compétences à des âges différents en fonction des environnements, des cultures et des expériences de vie [52]. L’apport des enfants à la société et les aptitudes qu’ils y injectent doivent être reflétés dans les lois, les politiques et les pratiques.
Les dirigeants des systèmes de santé doivent adopter une approche comparable à l’égard des décisions liées à l’âge de la transition vers les soins aux adultes. Il convient de reconnaître qu’individuellement, les jeunes et les familles considérés comme à « haut risque » en raison de problèmes médicaux ou psychosociaux complexes ont besoin d’un plus grand soutien multidisciplinaire à la transition [53]. Par ailleurs, il n’est pas garanti que les enfants et les adolescents profitent d’un accès équitable à des services de santé qui optimisent les soins de transition. Les groupes à haut risque incluent les enfants et les adolescents qui ont des besoins de santé complexes et qui habitent dans des milieux désavantagés parce qu’ils se situent en région rurale ou éloignée ou qui sont marginalisés en raison de leur situation économique, éducationnelle ou culturelle. Ces écarts se creusent considérablement aux alentours du moment de la transition vers les soins pour adultes.
Pour optimiser les résultats, le transfert des soins doit se produire lorsque la santé du patient est relativement stable. Afin de garantir des soins continus et de qualité aux patients et à la famille pendant la transition, des modèles de financement et de rémunération flexibles sont nécessaires pour soutenir les professionnels de la santé des deux côtés de la délimitation entre les soins pédiatriques et les soins aux adultes. Les mécanismes peuvent inclure l’élargissement des tranches d’âge qui délimitent la rémunération des pédiatres et le moment où les transferts deviennent obligatoires, et l’augmentation des ressources en milieu pédiatrique et aux dispensateurs de soins lorsque les patients sont transférés plus tard ou contractent des maladies qu’on observe davantage chez les adultes.
Les professionnels de la santé doivent évaluer régulièrement la préparation à la transition des jeunes qu’ils soignent et vérifier leurs aptitudes à prendre en charge leur santé et leur vie. Dans la mesure du possible, les équipes soignantes doivent désigner un « porte-parole » de la transition, c’est-à-dire un clinicien responsable de la planification et de la coordination de la transition. Il n’est pas toujours possible d’offrir ce service en milieu communautaire, et c’est pourquoi le clinicien traitant du jeune (médecin de famille, pédiatre ou infirmière praticienne) devra peut-être assumer un plus grand rôle pour planifier et coordonner la transition. Les cliniciens doivent considérer les jeunes comme des experts de leurs propres soins et, lorsque la situation s’y prête, demander proactivement leur avis au sujet du moment, de la manière et de la durée des soins de transition nécessaires. Les jeunes devraient avoir accès à l’information clé contenue dans leur dossier médical pendant le processus de transition et obtenir du soutien pour acquérir les connaissances de base en matière de santé [54]. L’acquisition de la littératie en matière de santé représente une étape importante du développement, qui permet de gagner en autonomie et d’apprendre à s’y retrouver dans le système de santé. Toutefois, ce processus est inatteignable pour un sous-groupe de jeunes. Dans ce cas, les parents ou d’autres proches devront conserver un rôle et des responsabilités clés en matière de soins après la transition. La transition devra tout de même être abordée de manière réfléchie chez ces jeunes et ces proches, qui devront s’habituer aux soins aux adultes, et pourrait devoir tenir compte de considérations particulières (p. ex., tutorat ou statut de décideur substitut).
Les pédiatres et autres spécialistes en pédiatrie devraient recruter un dispensateur de soins primaires pour adolescent dès le début du processus de transition afin de favoriser la continuité des soins, d’encourager une meilleure communication et une meilleure transmission des enjeux médicaux et sociaux et de multiplier les occasions de fournir de l’information sur les besoins de santé particuliers. Il est particulièrement important d’amorcer la collaboration très tôt, parce que dans le milieu des soins aux adultes, il n’y a souvent pas d’équivalent au dispensateur de soins pédiatriques qui s’affaire à répondre aux besoins de santé complexes ou chroniques du jeune avant sa transition. Ce rôle de « lien manquant » peut être assumé par un pédiatre généraliste, un pédiatre du développement, un pédiatre en soins complexes, un spécialiste de la médecine de l’adolescence ou un spécialiste de la médecine du comportement. L’entretien de nouvelles relations avec des dispensateurs de soins primaires et de soins aux adultes, qui peuvent inclure des internistes et des intervenants provenant d’organismes communautaires (pour établir les attentes et les services dans la région), doit être un processus continu [3].
Les dispensateurs de soins primaires sont bien placés pour assister et soutenir les patients et les familles pendant la transition des soins pédiatriques spécialisés, mais peuvent se sentir mal outillés pour prendre en charge le niveau de soins dont ont besoin les jeunes ayant des besoins de santé complexes. Cette lacune se creuse lorsque le dispensateur de soins primaires n’a pas participé délibérément aux soins pendant la période où le patient évoluait encore en surspécialité pédiatrique. Dans le milieu des soins primaires, entre autres, on constate d’autres lacunes « transitionnelles » connues liées à la formation, à l’enseignement, aux politiques en matière de santé et à des aspects préoccupants en santé [55]-[57]. Il est donc essentiel de fournir aux dispensateurs de soins primaires un enseignement, une formation et un renforcement des capacités spécialisés en matière de transition. Parallèlement, il faudrait permettre aux pédiatres et autres spécialistes en pédiatrie de poursuivre leurs soins de soutien après la transition, sous forme de maintien des consultations ou de période de partage des soins. Il se peut que le jeune ou le proche ne comprenne pas le rôle exact des soins primaires pendant la transition. Le renforcement de leur participation et de leur lien à un lieu de référence en soins primaires, conjugué à la stimulation de leur littératie en santé pendant et après le transfert vers les soins aux adultes, contribueront à une transition réussie [58]. Les futures recherches et décisions politiques devraient porter sur les interventions qui intègrent les soins primaires et spécialisés destinés à des populations particulières, dont les besoins de santé chroniques sont plus importants [45].
Même si de nombreux jeunes ayant des besoins de santé complexes ne voient pas leur dispensateur de soins primaires régulièrement, la participation de celui-ci à la transition revêt une importance particulière [58][59] et est associée à des résultats positifs chez les patients [25][60]. L’établissement de liens systématiques avec des dispensateurs de soins primaires devrait devenir une pratique établie et être priorisé chez les jeunes ayant des besoins de santé complexes bien avant le début du processus de transfert. Les soins primaires représentent le contexte le plus approprié aux soins, aux dépistages systématiques et aux interventions précoces, et ils peuvent favoriser la continuité lorsque les soins spécialisés deviennent plus fragmentés qu’avant la transition [61][62]. Il faut prévoir des efforts ciblés pour que les jeunes ayant des besoins de santé complexes aient accès à leur dispensateur de soins primaires et communiquent régulièrement avec lui et pour favoriser cette relation le plus tôt possible.
Les publications contiennent peu de conseils [45]-[47] sur le rôle des soins primaires pendant la transition, mais il est possible d’offrir un accès continu et équitable à des soins de santé coordonnés complets, axés sur la famille et adaptés au développement [47]. Elles appuient l’approche globale d’optimisation des soins pendant la transition vers les soins aux adultes [63]-[67]. Les équipes de services communautaires et de soins primaires ont tendance à fournir des soins plus globaux que dans d’autres milieux de soins et sont efficaces pour l’intégration des déterminants sociaux de la santé, tels que le logement, l’école, l’emploi et les services sociaux, afin de répondre aux besoins des jeunes là où ils habitent.
Une transition réussie garantit des soins continus, coordonnés et adaptés au développement et à la maturité de chaque jeune, tout en améliorant (ou du moins en maintenant) le contrôle de sa maladie, sa satisfaction, sa qualité de vie et sa participation sociale au début de l’âge adulte. Les améliorations aux soins de transition sont limitées par le peu d’indicateurs de qualité, de même que par le peu de méthodes standardisées, fondées sur des données probantes et faciles à utiliser pour mesurer ou suivre les indicateurs en question [18][67]. Ces indicateurs et ces méthodes sont nécessaires pour déterminer les aspects à améliorer, suivre les changements au fil du temps, évaluer les programmes, établir des normes de référence entre les régions sociosanitaires et cibler de prochaines recherches. Il est essentiel que les intervenants collaborent afin de répondre aux besoins de santé complexes pendant et après la transition, afin que chaque jeune réalise son plein potentiel.
Les principes suivants des pratiques de transition réussies doivent être pris en compte et intégrés aux services cliniques, à la recherche et aux revendications pour le compte des jeunes et de leur famille.
1. Une transition efficace garantit des soins continus, complets, coordonnés, adaptés au développement et respectueux des besoins de tous les participants : les patients, les familles et les professionnels de la santé. Pour obtenir des résultats optimaux, les services de transition pour les jeunes qui ont des besoins de santé complexes doivent être intégrés aux soins cliniques et fournis par des équipes multidisciplinaires.
2. Pour préparer les jeunes à la transition, il faut adopter un plan graduel pour accroître leur autonomie et reconnaître l’évolution des rôles des parents et des proches. Des limites d’âge flexibles entre les services de soins pédiatriques et aux adultes s’imposent. Les décisions sur le moment de la transition doivent tenir compte du développement et de l’aptitude de chaque jeune.
3. Les dispensateurs de soins pédiatriques et de soins aux adultes doivent préparer ensemble des stratégies de santé systémiques qui rationalisent et préservent les soins aux jeunes pendant leur transition vers les soins aux adultes. Ils doivent revendiquer des modèles de soins intégrés en milieu tertiaire, communautaire et primaire, conformément à des approches axées sur les jeunes. Les soins personnalisés incluent des conversations avec les jeunes pour connaître la place qu’ils veulent donner à leurs parents ou à leurs proches dans le cadre des futurs soins, dans des situations particulières. Lorsque l’autonomie d’un jeune n’est pas garantie, cette approche doit inclure l’appui des proches. Une courte période de chevauchement des soins entre les pédiatres et autres spécialistes en pédiatrie, d’une part, et les dispensateurs de soins primaires, d’autre part, peut être nécessaire. Pendant ce chevauchement, les cliniciens de soins primaires doivent envisager de rencontrer davantage les jeunes en âge de vivre cette transition, afin d’établir une relation et d’optimiser la continuité des soins.
4. La population croissante d’adolescents qui ont des besoins de santé complexes et transitionnent vers les soins aux adultes doit stimuler la redéfinition d’indicateurs de qualité pour mesurer l’amélioration de la santé et de la prestation des soins auprès de cette population vulnérable et pour aider les jeunes à s’y retrouver dans leurs changements développementaux et d’autres changements à toutes les étapes de la vie.
5. De nouvelles initiatives d’éducation sont nécessaires pour renforcer les soins destinés aux jeunes qui ont des besoins de santé complexes dans des milieux cliniques diversifiés. Une approche nationale et coopérative de l’éducation s’impose auprès des jeunes, des familles et des dispensateurs de soins pédiatriques, de soins aux adultes et de soins primaires.
6. Il est essentiel d’assurer le financement de programmes adaptables et de systèmes de rémunération des médecins qui appuient des soins continus, communs et intégrés pendant la période de transition. Les modèles de financement et de paiement doivent être flexibles pour ce qui est des limites d’âge et des soins partagés entre les services de santé pédiatriques et aux adultes.
Santé des enfants Canada. Child Health Hub in Transition to Adult Healthcare
Le comité de la bioéthique, le comité de la pédiatrie communautaire et le comité de la santé mentale et des incapacités du développement, ainsi que le comité directeur de la section de la pédiatrie hospitalière de la Société canadienne de pédiatrie ont révisé le présent document de principes, de même que les Directeurs de pédiatrie du Canada et des membres du Comité consultatif sur l’exercice de la médecine familiale du Collège des médecins de famille du Canada. Santé des enfants Canada l’a également révisé et approuvé.
COMITÉ DE LA SANTÉ DE L’ADOLESCENT DE LA SOCIÉTÉ CANADIENNE DE PÉDIATRIE (2020-2021)
Membres : Holly Agostino MD, Marian Coret MD (membre résidente), Megan Harrison MD, Karen Leis MD (représentante du conseil), Alene Toulany MD, Ashley Vandermorris MD, Ellie Vyver MD (présidente)
Représentante : Megan Harrison MD (section de la santé de l’adolescent de la SCP)
Auteurs principaux : Alene Toulany MD, Jan Willem Gorter MD Ph. D., Megan Harrison MD
Avertissement : Les recommandations du présent document de principes ne constituent pas une démarche ou un mode de traitement exclusif. Des variations tenant compte de la situation du patient peuvent se révéler pertinentes. Les adresses Internet sont à jour au moment de la publication.
Mise à jour : le 8 décembre 2023