Document de principes
Affichage : le 31 juillet 2020
Brigitte Lemyre, Michael Dunn, Bernard Thebaud, Comité d’étude du fœtus et du nouveau-né
Paediatr Child Health 2020 25(5):327–331.
Les corticostéroïdes ont longtemps été administrés pendant la période postnatale pour prévenir et traiter la dysplasie bronchopulmonaire (DBP), une cause importante de morbidité et de mortalité chez les nouveau-nés prématurés. L’administration préventive de dexaméthasone pendant la première semaine de vie est liée à une augmentation du risque de paralysie cérébrale, et l’administration précoce de corticostéroïdes inhalés semble être associée à une hausse du risque de mortalité. À l’heure actuelle, aucune de ces deux approches n’est recommandée pour prévenir la DBP. Selon de nouvelles données probantes, un traitement prophylactique d’hydrocortisone à des doses physiologiques, entrepris avant 48 heures de vie sans ajout d’indométacine, améliore la survie sans DBP, et n’a pas d’effets neurodéveloppementaux indésirables à l’âge de deux ans. Les cliniciens peuvent envisager ce traitement pour les nouveau-nés les plus à risque de DBP. Il n’est pas recommandé d’entreprendre un traitement systématique de dexaméthasone pour tous les nouveau-nés sous assistance respiratoire, mais après la première semaine de vie, les cliniciens peuvent envisager un court traitement de dexaméthasone à faible dose (0,15 mg/kg/jour à 0,2 mg/kg/jour) pour certains nouveau-nés à haut risque de DBP ou atteints d’une DBP évolutive. Aucune donnée probante n’indique que l’hydrocortisone remplace la dexaméthasone avec efficacité ou innocuité dans le traitement d’une DBP évolutive ou établie. Les données à jour n’appuient pas l’administration de corticostéroïdes inhalés pour traiter la DBP.
Mots-clés : Bronchopulmonary dysplasia (BPD); Dexamethasone; Hydrocortisone; Inhaled corticosteroids; Postnatal corticosteroids; Preterm infants
La dysplasie bronchopulmonaire (DBP) est une grave complication de la prématurité, qui touche environ 40 % des nouveau-nés venus au monde avant 29 semaines d’âge gestationnel (AG) [1][2]. Les récents progrès des soins néonatals ont amélioré la survie des extrêmes prématurés. Au moins en partie à cause de ce meilleur taux de survie, l’incidence de DBP n’a pas diminué au Canada depuis dix ans [2]. La DBP est reliée à une morbidité respiratoire et neurodéveloppementale permanente.
Les corticostéroïdes ont longtemps été utilisés pendant la première semaine de vie pour prévenir une DBP évolutive ou établie ou pour la traiter après cette période. Cependant, les essais cliniques et les analyses systématiques sur le sujet ont fait ressortir les effets secondaires à long terme de ce traitement, particulièrement le risque accru de paralysie cérébrale (PC). Dans la révision précédente du présent document de principes parue en 2012, l’administration systématique de corticostéroïdes était déconseillée pendant la première semaine de vie pour prévenir la DBP, par mesure de sécurité [3], et il était recommandé de faire preuve de prudence quant à la décision d’administrer des corticostéroïdes après cette période. On suggérait également de tenir un échange éclairé avec les parents sur les risques et les avantages de ces médicaments et on soulignait l’importance d’obtenir des données probantes sur l’innocuité et l’efficacité de faibles doses de dexaméthasone et des corticostéroïdes inhalés.
Les études publiées depuis 2012 sont passées en revue dans le présent document de principes pour orienter l’administration postnatale de corticostéroïdes chez les nouveau-nés à risque de DBP ou atteints d’une DBP évolutive ou établie.
Une bibliothécaire qui maîtrise les analyses systématiques a conçu le protocole de recherche et l’a mis à exécution. Ses recherches dans MEDLINE incluaient des publications en ligne avant l’impression, des articles en cours de préparation et d’autres citations non indexées (1946 au 14 juin 2018). Elle a également effectué des recherches dans Embase (1980 au 14 juin 2018) et le registre d’essais CENTRAL de la Collaboration Cochrane (numéro de mai 2018). Elle a cherché expressément des essais aléatoires et contrôlés (EAC), des études de cohorte et des analyses systématiques. Ses recherches n’étaient pas restreintes par la langue, mais se limitaient aux documents saisis dans les bases de données depuis 2012. Les termes de recherche incluaient bronchopulmonary dysplasia, chronic lung disease, dexamethasone, hydrocortisone, inhaled corticosteroids, postnatal corticosteroids et preterm infants.
En général, les études sur la prévention de la DBP aborderaient les thérapies potentielles administrées pendant la première semaine de vie, mais celles visant à traiter la DBP évolutive ou établie étaient axées sur les traitements administrés après cette période. Le présent document de principes adopte la même différenciation.
La qualité des preuves et les catégories de recommandations reposent sur les critères du Groupe d’étude canadien sur les soins de santé préventifs [4].
Aucune publication ne s’est intéressée à un nouvel essai clinique pour prévenir la DBP sur l’administration de dexaméthasone chez les nouveau-nés pour prévenir la DBP depuis 2012. Un grand essai clinique sur l’administration précoce d’hydrocortisone, deux publications secondaires et le suivi d’un EAC au bout de cinq à sept ans ont toutefois été publiés [5]–[8]. D’autres parutions récentes sont à retenir : la mise à jour d’une analyse systématique Cochrane et une méta-analyse de quatre essais sur l’hydrocortisone à des doses physiologiques dans les premiers jours de vie pour prévenir la DBP, exécutée à partir de données individuelles [9][10]. Le détail de ces études figure au tableau 1.
Dans l’ensemble, les bienfaits potentiels de la dexaméthasone pendant la première semaine de vie sont contrebalancés par des effets secondaires substantiels. Ainsi, la dexaméthasone n’est pas recommandée pour prévenir la DBP. (Qualité des preuves 1)
D’après les données probantes à jour, l’hydrocortisone à des doses physiologiques de substitution, administrée avant 24 à 48 heures de vie aux nouveau-nés venus au monde à moins de 28 semaines d’AG, accroît la survie sans DBP à 36 semaines et la survie avant le congé lorsqu’elle n’est pas associée à de l’indométacine prophylactique et n’a pas d’effets néfastes sur le développement neurologique à l’âge de deux ans. Ces effets bénéfiques étaient plus prononcés chez les nouveau-nés exposés à la chorioamnionite de la mère et chez ceux venus au monde à 26 semaines d’AG ou plus. L’incidence de sepsis tardif était plus élevée chez les nouveau-nés ayant reçu un traitement d’hydrocortisone, et cette observation était plus fréquente chez les nouveau-nés exposés à une chorioamnionite et chez ceux venus au monde à moins de 26 semaines d’AG. En revanche, dans l’essai le plus vaste, les nouveau-nés venus au monde à moins de 26 semaines d’AG présentaient un meilleur pronostic neurodéveloppemental que ceux qui avaient reçu un placebo. Il se peut que les nouveau-nés à haut risque (nés à moins de 28 semaines d’AG, notamment ceux exposés à la chorioamnionite) profitent de l’hydrocortisone à des doses physiologiques de substitution. Il est conseillé aux cliniciens d’évaluer chaque cas.
Tableau 1 offert en supplément. Essais et analyses systématiques sur l’administration systémique de corticostéroïdes pendant la première semaine de vie pour prévenir la DBP | |||||
Étude |
Méthodologie |
Taille de l’échantillon et nombre de centres |
Critères d’admissibilité |
Intervention |
Résultats |
EAC |
523 21 centres Échantillon prévu de 786 patients; le DSMB a mis un terme au recrutement à cause d’enjeux techniques et financiers |
De 24+0 à 27+6 semaines d’AG, <24 heures de vie; les nouveau-nés petits par rapport à leur AG (<3e percentile) étaient exclus |
1 mg/kg d’hémisuccinate d’hydrocortisone par jour x 7 jours, puis 0,5 mg/kg par jour x 3 jours (total : 8,5 mg/kg) |
Survie sans DBP* 60 % par rapport à 51 % (RR 1,48, IC à 95 %, 1,02 à 2,16) Aucune différence dans les taux de perforation GI Analyse de sous-groupe : Plus de sepsis chez les nouveau-nés de 24 à 25 semaines d’AG du groupe traité Suivi à l’âge de 2 ans : Aucune différence d’atteinte neurodéveloppementale ou de PC† Analyse de sous-groupe : Meilleur développement neurologique global chez les nouveau-nés venus au monde entre 24 et 25 semaines d’AG qui ont reçu de l’hydrocortisone que chez ceux qui n’en ont pas reçu |
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Peltoniemi et coll. [7] |
EAC |
51; 37 suivis au bout de 5 à 7 ans Monocentrique |
De 501 g à 1 250 g, de 23+0 à 30+0 semaines d’AG, sous assistance respiratoire dans les 24 premières heures de vie |
2,0 mg/kg d’hydrocortisone par jour x 2 jours, 1,5 mg/kg par jour x 2 jours, 0,75 mg/kg par jour x 6 jours (total : 11,5 mg/kg) |
L’étude a été interrompue à cause d’un taux plus élevé de perforations GI chez les nouveau-nés traités par hydrocortisone Suivi au bout de 5 à 7 ans : QI verbal et QI fonctionnel moyens non différents. QI de performance moyen plus bas chez les enfants traités par hydrocortisone (88,3 [14,5] par rapport à 99,1 [14,0]; p = 0,034) |
Doyle, LW et coll. [9] |
Analyse systématique |
4 395 32 études Données de suivi de 13 essais |
Nouveau-nés prématurés à risque de DBP |
21 essais de dexaméthasone 11 essais d’hydrocortisone |
Extubation plus rapide, diminution du risque de DBP, de PCA et de grave RdP contrebalancée par les dommages à court (perforation GI) et à long (risque accru de PC) terme La plupart des bienfaits et des dommages sont attribués à la dexaméthasone. Risque de perforation GI attribué à l’hydrocortisone Qualité méthodologique limitée des études de suivi, à cause du suivi avant l’âge scolaire ou d’une puissance statistique trop faible |
Shaffer et coll. [10] |
Méta-analyse de données individuelles (incluant les essais de Baud et Peltoniemi) |
982 4 études |
Nouveau-nés prématurés (<30 semaines d’AG) ou de moins d’1 kg dans les 48 premières heures de vie |
Hydrocortisone à des doses de substitution pendant 10 à 15 jours en prophylaxie d’une insuffisance surrénalienne (dose totale de 8,5 à 13,5 mg/kg) |
Observations chez les nouveau-nés traités par hydrocortisone :
Analyse de sous-groupe : Les perforations GI spontanées ont augmenté avec la prise d’indométacine et d’hydrocortisone, mais pas avec la prise d’hydrocortisone seule Effets sur la survie jusqu’à 36 semaines sans DBP Plus de décès avant le congé chez les nouveau-nés exposés à la chorioamnionite ou venus au monde à ≥26 semaines d’AG |
* Définition physiologique de DBP |
Deux EAC et une analyse systématique ont été publiés depuis 2012 [11]–[14]. Le détail de ces études figure au tableau 2.
Même si les survivants de la plus vaste étude réalisée jusqu’à présent étaient moins nombreux à avoir souffert de DBP [11], plus de nouveau-nés sélectionnés au hasard dans le groupe ayant pris des corticostéroïdes inhalés étaient décédés au moment du suivi à l’âge de deux ans [14]. Les auteurs ont souligné que la baisse d’incidence de la DBP a peut-être été réalisée aux dépens d’une hausse de la mortalité.
Tableau 2 offert en supplément. Essais et analyses systématiques sur l’administration précoce de corticostéroïdes inhalés pour prévenir la DBP | |||||
Étude |
Méthodologie |
Taille de l’échantillon et nombre de centres |
Critères d’admissibilité |
Intervention |
Résultats et taille d’effet |
EAC |
863 40 |
De 23+0 à 27+6 semaines d’AG, assistance respiratoire en pression positive à <12 heures de vie |
Budésonide par aérosol-doseur 800 mcg par jour x 14 jours; 400 mcg par jour jusqu’à 32 semaines d’AG ou jusqu’à ce que l’oxygénothérapie ou l’assistance respiratoire ne soit plus nécessaire |
Baisse des décès ou des cas de DBP chez les nouveau-nés qui ont reçu de la budésonide : 40 % par rapport à 46 % (RR 0,71, IC à 95 %, 0,53 à 0,97) Survie sans DBP plus élevée chez les nouveau-nés qui ont reçu de la budésonide : 27,8 % par rapport à 38 %; p = 0,004 Décès 16,9 % par rapport à 13,8 %; p = 0,17 Incapacité neurodéveloppementale entre 18 et 22 mois d’âge corrigé : 48,1 % par rapport à 51,4 %; p = 0,40 Décès à l’âge de 18 à 22 mois : 19,9 % par rapport à 14,5 %; p = 0,04, en faveur du groupe témoin |
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Nakamura et coll. [12] |
EAC |
211 12 |
PN <1 000 g, devant être intubés et placés sous assistance respiratoire à moins de 24 heures de vie |
100 mcg de propionate de fluticasone par jour x 6 semaines ou jusqu’à l’extubation |
Décès ou oxygénothérapie au congé : 14 % par rapport à 22 %; p = 0,15 |
Shah et coll. [13] (incluant les études de Bassler et Nakamura) |
Analyse systématique Cochrane |
1 644 10 études |
Nouveau-nés prématurés au PN ˂1 501 g, sous assistance respiratoire et sélectionnés au hasard pendant la première ou la deuxième semaine de vie (seulement 2 essais autorisaient la participation entre 7 et 14 jours de vie) |
Budésonide, dipropionate de béclométhasone, propionate de fluticasone ou flunisolide inhalé pendant au moins 2 semaines |
Observations chez les nouveau-nés traités par des corticostéroïdes inhalés :
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AG âge gestationnel; DBP dysplasie bronchopulmonaire; EAC essai aléatoire et contrôlé; IC intervalle de confiance; mcg microgramme; NST nombre de sujets à traiter; PN poids à la naissance; RR risque relatif |
D’après les données probantes à jour, les effets bénéfiques possibles sur le taux de DBP semblent contrebalancés par le risque accru de mortalité. Il n’est pas recommandé d’administrer des corticostéroïdes inhalés (comme la budésonide et la fluticasone) pendant les deux premières semaines de vie pour prévenir la DBP. (Qualité des preuves 1)
Aucune publication n’a rendu compte d’un nouvel essai sur le traitement tardif de dexaméthasone depuis 2012. Un EAC pilote monocentrique et un EAC multicentrique sur le succinate d’hydrocortisone ont toutefois été publiés depuis [15][16]. Un EAC effectué en 2019 n’a révélé aucune différence quant aux pronostics combinés de décès ou de DBP à 36 semaines d’AG corrigé, mais a permis d’observer une diminution du taux de décès chez les nouveau-nés qui ont reçu de l’hydrocortisone (16 % par rapport à 24 %) [16]. Ces résultats encourageants indiquent que l’administration tardive d’hydrocortisone peut être bénéfique pour les nouveau-nés prématurés atteints d’une DBP évolutive. Cependant, il faudra réaliser plus de recherches pour confirmer cette hypothèse avant de recommander le traitement.
Une analyse systématique et une méta-analyse Cochrane pour évaluer à la fois la dexaméthasone et le succinate d’hydrocortisone ont été mises à jour en 2017 [17]. Le détail est présenté au tableau 3. Des préoccupations ont été soulevées quant à la toxicité potentielle de la dexaméthasone, y compris la possibilité d’effets toxiques des agents de préservation de sulfite utilisés pour préparer ce médicament. Certains chercheurs ont étudié la bétaméthasone ou la méthylprednisolone pour remplacer la dexaméthasone chez les nouveau-nés atteints d’une DBP évolutive, mais la qualité des données probantes de ces études n’est pas suffisante pour qu’il soit possible d’approuver ces médicaments [18]–[22].
Tableau 3 offert en supplément. Études sur l’administration systémique de corticostéroïdes après la première semaine de vie pour traiter une DBP évolutive | ||||||
Étude |
Méthodologie |
Taille de l’échantillon et nombre de centres |
Critères d’admissibilité |
Intervention |
Résultats et taille d’effet |
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Parikh et coll. [15] |
EAC |
64 Monocentrique |
PN ≤1 000 g, assistance respiratoire entre 10 et 21 jours de vie et score de l’index respiratoire ≥2, ou ≥3 en présence d’une amélioration au cours des 24 heures précédentes |
3 mg/kg/jour de succinate d’hydrocortisone x 4 jours; 2 mg/kg/jour x 2 jours; 1 mg/kg/jour x 1 jour (dose cumulative : 17 mg/kg sur 7 jours) |
Volume du cerveau à 38 semaines de vie : pas de différence Pas de différence de DBP ou de durée de la ventilation mécanique |
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Onland et coll. (résumé) [16] |
EAC |
372 Multicentrique |
<30 semaines d’AG à la naissance, sous assistance respiratoire entre 7 et 14 jours de vie, score de l’index respiratoire ≥2,5 |
Sevrage d’hydrocortisone sur 22 jours; dose cumulative de 72 mg/kg. Stéroïdes ouverts autorisés : 28 % dans le groupe traité et 56 % dans le groupe sous placebo |
Décès ou DBP à 36 semaines : 70 % par rapport à 74 % : RR 0,95 (IC à 95 %, 0,84 à 1,08) Mortalité à 36 semaines : 16 % par rapport à 24 % : RR 0,65 (IC à 95 %, 0,43 à 0,99) |
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Doyle LW et coll. [17] (n’incluant pas l’étude d’Onland et coll.) |
Analyse systématique Cochrane |
1 424 21 études |
Nouveau-nés prématurés atteints d’une DBP évolutive ou établie, définie comme exigeant une oxygénothérapie, une assistance respiratoire (ou les deux), avec ou sans modifications radiographiques démontrant l’aggravation de la DBP |
Dexaméthasone ou hydrocortisone, IV ou par voie orale pendant 7 à 42 jours. La dose totale dépendait de l’étude |
Observations chez les nouveau-nés traités par l’administration tardive de corticostéroïdes :
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AG âge gestationnel; DBP dysplasie bronchopulmonaire; EAC essai aléatoire et contrôlé; IC intervalle de confiance; IV par voie intraveineuse; PC paralysie cérébrale; PN poids à la naissance; RdP rétinopathie des prématurés; RR risque relatif |
Il n’est pas recommandé d’administrer de la dexaméthasone systématiquement à tous les nouveau-nés qui ont besoin d’une assistance respiratoire après sept jours de vie pour traiter une DBP évolutive. Pour l’instant, l’hydrocortisone n’est pas davantage recommandée pour traiter la DBP évolutive. On attend les résultats d’études en cours.
Aucun essai réalisé après 2012 sur l’administration tardive de stéroïdes inhalés n’a été extrait. Une analyse systématique Cochrane mise à jour en 2017 incluait huit essais et 232 patients [23]. Certains nouveau-nés étaient sous assistance respiratoire et d’autres, non. Le traitement avait été entrepris entre sept et 21 jours de vie. La méta-analyse a révélé une diminution du risque d’échec de l’extubation à sept jours de vie (RR 0,80, IC à 95 %, 0,66 à 0,98; cinq études, 79 nouveau-nés) chez les nouveau-nés qui avaient reçu des corticostéroïdes inhalés. Aucune différence n’a été constatée quant au taux de décès, de DBP, de décès à 36 semaines de vie ou de DBP à 36 semaines de vie. Les conclusions sont limitées par le petit nombre de nouveau-nés à l’étude et par l’hétérogénéité des patients et de l’inhalothérapie offerte.
Les corticostéroïdes inhalés ne peuvent pas être recommandés pour traiter la DBP. (Qualité des preuves 1)
Même si un nombre suffisant d’études a été mené auprès d’un nombre suffisant de nouveau-nés pour permettre de réaliser des méta-analyses et orienter la pratique, l’utilisation généralisée de traitements ouverts et la variabilité marquée entre les patients évalués (p. ex., au sujet des critères d’admissibilité, du type et de la durée d’utilisation des stéroïdes, des groupes comparatifs et des résultats cliniques) ont suscité la tenue d’un certain nombre d’analyses secondaires pour arriver à préciser les recommandations cliniques.
Selon une récente méta-analyse, les données probantes sont insuffisantes pour déterminer la posologie optimale de la dexaméthasone (dose cumulative plus élevée ou plus faible, traitement la première semaine plutôt qu’après une semaine, schéma posologique pulsé plutôt qu’en continu) [24]. Deux autres méta-analyses comparant les corticostéroïdes inhalés aux corticostéroïdes systémiques n’ont révélé aucun avantage pour l’une ou l’autre approche [25][26].
Une méta-régression a été mise à jour et a établi que plus le taux de DBP était élevé dans le groupe témoin, plus la différence entre le taux de décès ou de PC du groupe témoin et du groupe traité par dexaméthasone était faible , ce qui laisse supposer qu'en cas de risque initial élevé de DBP, le traitement de dexaméthasone pourrait être bénéfique [27]. Les auteurs de l’étude ont conclu que lorsque le risque de DBP était supérieur à 60 %, le traitement de dexaméthasone semblait réduire le taux de décès ou de PC. Cette possibilité a des répercussions cliniques importantes : pour un sous-groupe de nouveau-nés à haut risque de DBP, les bienfaits du traitement semblent supérieurs aux risques.
Pour tenir compte de l’effet confusionnel découlant de l’utilisation ouverte de corticostéroïdes dans les EAC, une méta-régression a été réalisée pour comparer la dexaméthasone à un placebo chez les nouveau-nés de plus de sept jours de vie [28]. Ainsi, de 27 % à 65 % des nouveau-nés affectés au groupe sous placebo, et de 10 % à 33 % de ceux affectés au groupe sous traitement actif ont reçu de la dexaméthasone ouverte. Dans l’ensemble, les nouveau-nés du groupe sous traitement actif présentaient un plus faible taux de décès ou de DBP sans que l’incidence de pronostics neurodéveloppementaux indésirables augmente, et ce bienfait apparent était inversement proportionnel au degré d’utilisation ouverte dans le groupe sous placebo (plus l’utilisation ouverte est élevée, moins on observe de bienfaits). En guise de mise en garde supplémentaire, le traitement de dexaméthasone était relié à une augmentation du taux de PC lorsqu’il était reporté après 21 jours de vie.
Ces observations portent fortement à croire que pour un sous-groupe de nouveau-nés à haut risque de DBP (qui demeurent sous assistance respiratoire après la première semaine de vie, dont les besoins en oxygène augmentent et dont la maladie pulmonaire s’aggrave), on doit envisager un court traitement de dexaméthasone (0,15 mg/kg/jour à 0,2 mg/kg/jour réduit progressivement sur sept à dix jours). Le moment de lancer le traitement et la dose initiale doivent dépendre de l’âge postnatal et de la gravité de l’affection. Le traitement avant la DBP est bien établi, et il est conseillé d’établir le titrage en fonction de la gravité de la maladie. (Qualité des preuves 5)
De récentes études ont rendu compte de l’administration précoce d’un mélange de corticostéroïdes et de surfactant par voie trachéale à des nouveau-nés très prématurés [29][30]. Même si les effets bénéfiques de cette thérapie d’association pour réduire les décès ou la DBP étaient marqués, relativement peu de nouveau-nés ont fait l’objet de ces études. Il faudra attendre les résultats de recherches en cours avant de pouvoir formuler une recommandation au sujet de cette pratique.
Les auteurs tiennent à remercier Margaret Sampson, MBSI, Ph. D., AHIP Centre hospitalier pour enfants de l’est de l’Ontario), qui a établi les stratégies de recherche électronique. La section de la santé respiratoire de la Société canadienne de pédiatrie a révisé le présent document de principes, de même que la Société canadienne de thoracologie et les membres du Groupe canadien d’endocrinologie pédiatrique, soit les docteurs Rose Girgis (université de l’Alberta), Alex Ahmet (Centre hospitalier pour enfants de l’est de l’Ontario) et Julia Von Oettigen (Hôpital de Montréal pour enfants).
COMITÉ D’ÉTUDE DU FŒTUS ET DU NOUVEAU-NÉ DE LA SOCIÉTÉ CANADIENNE DE PÉDIATRIE
Membres : Heidi Budden MD (représentante du conseil), Mireille Guillot MD (membre résidente), Leonora Hendson MD, Thierry Lacaze-Masmonteil MD, Ph. D. (président sortant), Brigitte Lemyre MD, Michael R. Narvey MD (président), Vibhuti Shah MD
Représentants : Radha Chari MD, La Société des obstétriciens et gynécologues du Canada; James Cummings MD, comité d’étude du fœtus et du nouveau-né, American Academy of Pediatrics; William Ehman MD, Le Collège des médecins de famille du Canada; Roxanne Laforge inf., Partenariat des programmes périnatals du Canada; Chantal Nelson Ph. D., Agence de la santé publique du Canada; Eugene H. Ng MD, section de la médecine néonatale et périnatale de la SCP; Doris Sawatzky-Dickson inf., Association canadienne des infirmières et infirmiers en néonatologie
Auteurs principaux : Brigitte Lemyre MD, Michael Dunn MD, Bernard Thebaud MD
Avertissement : Les recommandations du présent document de principes ne constituent pas une démarche ou un mode de traitement exclusif. Des variations tenant compte de la situation du patient peuvent se révéler pertinentes. Les adresses Internet sont à jour au moment de la publication.
Mise à jour : le 8 février 2024