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La contraception chez les adolescents canadiens

Affichage : le 12 juin 2018 | Reconduit : le 11 janvier 2024


La Société canadienne de pédiatrie vous autorise à imprimer une copie unique de ce document tiré de notre site Web. Pour obtenir l'autorisation d'en réimprimer ou d'en reproduire des copies multiples, lisez notre politique sur les droits d'auteur, à l'adresse www.cps.ca/fr/policies-politiques/droits-auteur.

Auteur(s) principal(aux)

Giuseppina Di Meglio, Colleen Crowther, Joanne Simms; Canadian Paediatric Society, Comité de la santé de l’adolescent

Paediatr Child Health 2020 23(4): 278–284.

Résumé

Chez les adolescents, la santé sexuelle et reproductive est un aspect important des soins de santé complets. Le présent document de principes fournit des conseils afin de sélectionner des contraceptifs à l’intention des adolescentes et de leur en prescrire, y compris les contraceptifs hormonaux courants (pilule, timbre, anneau et progestatif injectable) et les contraceptifs réversibles à longue durée d’action (CRLDA). Tel qu’on les utilise habituellement, les CRLDA, qui incluent les implants sous-cutanés (non offerts au Canada) et les contraceptifs intra-utérins, sont beaucoup plus efficaces que les contraceptifs hormonaux. Le présent document de principes recommande les CRLDA comme contraception de première intention chez les adolescentes canadiennes, tout en soulignant que les dispensateurs de soins doivent collaborer avec les jeunes dans le choix d’un moyen de contraception que celles-ci trouvent acceptable, sécuritaire, efficace et pratique. Des stratégies sont proposées pour éliminer les obstacles à l’adoption et au maintien de la contraception.

Mots-clés : Bone mineral density; Contraception; Combined oral contraception; Emergency contraception; Intrauterine contraception; Long-acting reversible contraception (LARC); Sexual and reproductive health

Chez les adolescents, la santé sexuelle et reproductive (SSR) est un aspect important des soins de santé complets. À 17 ans, plus de la moitié des adolescents canadiens sont sexuellement actifs [1]. La grossesse à l’adolescence peut avoir des repercussions très négatives sur la vie physique, affective et socioéconomique des adolescentes et des enfants en cause, ainsi que sur celle de leurs parents, de leur famille élargie et de leur communauté [2][3]. Tous les dispensateurs de soins (DdS) doivent donc intégrer la sensibilisation à la contraception et à la fertilité à leur planification de la prise en charge des adolescents.

Il faut ouvrir très tôt le dialogue sur la sexualité, l’activité sexuelle, la planification familiale et les infections transmises sexuellement (ITS), soit avant le début de l’activité sexuelle, et le poursuivre tout au long de l’adolescence. L’inclusion des parents dans les discussions, particulièrement au début, peut favoriser le dialogue entre les parents et les adolescents sur ce sujet délicat, mais il est également essentiel de donner aux adolescents des possibilités de parler de sexualité avec leur DdS seul à seul et en toute confidentialité. En effet, la confidentialité maximise la probabilité d’obtenir une histoire sexuelle complète et la possibilité d’aborder des questions et des inquiétudes que les adolescents ne se sentiraient peut-être pas à l’aise de confier à leurs parents. La loi protège le droit des adolescents à la confidentialité des soins en SSR, y compris les prescriptions de contraceptifs et de traitements des ITS, pourvu qu’ils aient une maturité suffisante pour comprendre la nature et les consequences du traitement (et, au Québec, qu’ils soient âgés d’au moins 14 ans). Le présent document de principes analyse les grandes règles de la contraception des adolescentes et propose que des options sécuritaires, efficaces et pratiques pour améliorer l’observance.

Tableau 1. Taux d’échec des contraceptifs
  % de grossesse non planifiée dans la première année d’utilisation
Méthode Utilisation habituelle* Utilisation parfaite†
Absence de méthode 94§ 94§
Retrait 22 4
Préservatif (sans spermicide)    
  • Féminin
21 5
  • Masculin
18 2
Diaphragme (et spermicide) 12 6
Contraceptif oral combiné 9 0,3
Timbre transdermique (p. ex., Evra) 9 0,3
Anneau intravaginal (p. ex., NuvaRing) 9 0,3
Pilule de progestatif seul 9 0,3
Contraceptif injectable (p. ex., Depo-Provera) 6 0,2
Contraceptif intra-utérin    
  • DIU au cuivre
0,8 0,6
  • SIU à libération de lévonorgestrel (p. ex., Mirena, Jaydess)
0,2 0,2
Implant sous-cutané (p. ex., Nexplanon)¶ 0,05 0,05

Adapté et traduit de la référence [47]. DIU dispositif intra-utérin; SIU système intra-utérin

*Chez les couples types qui commencent à utiliser une méthode (pas nécessairement pour la première fois), pourcentage qui vivent une grossesse non planifiée pendant la première année s’ils n’arrêtent pas de l’utiliser pour toute autre raison.

†Chez les couples qui commencent à utiliser une méthode (pas nécessairement pour la première fois) et qui l’utilisent parfaitement (de manière à la fois constante et correcte), pourcentage qui vivent une grossesse non planifiée pendant la première année s’ils n’arrêtent pas de l’utiliser pour toute autre raison.

§Cette évaluation concerne les adolescents. Chez les adultes, le pourcentage est de 85 % [9].

¶Non offert au Canada.

LE CHOIX DE LA CONTRACEPTION

Au tableau 1 sont présentés les taux d’échec des methods contraceptives individuelles lorsqu’elles sont utilisées dans des conditions « parfaites » (le milieu de recherche) par rapport à des milieux plus « habituels » (la pratique clinique). Ces données font ressortir le principe selon lequel plus la méthode contraceptive dépend de l’utilisateur, plus elle risque d’échouer. Pour présenter cette lacune aux jeunes patientes, on peut diviser les méthodes contraceptives en trois catégories, d’après les taux d’échec croissants liés à une « utilisation habituelle ». Ainsi, les contraceptifs réversibles à longue durée d’action (CRLDA), qui agissent de manière continue pendant plusieurs années sans l’intervention des patientes, s’associent au plus faible taux d’échec et représentent des choix de première catégorie. Les CRLDA comprennent les dispositifs intra-utérins (DIU) au cuivre, les systèmes intra-utérins (SIU) hormonaux et les implants souscutanés à libération de progestatif, qui ne sont pas encore sur le marché au Canada.

Les contraceptifs hormonaux font partie de la deuxième catégorie. Ils dépendent d’une utilisation quotidienne ininterrompue (contraceptifs oraux combinés [COC] et pilules de progestatif seul [PPS]), hebdomadaire (timbre transdermique), mensuelle (anneau vaginal) ou trimestrielle (contraceptif injectable d’acétate de médroxyprogestérone-retard [AMPR]).

Les contraceptifs de la troisième catégorie sont utilisés au moment des relations sexuelles et reposent sur la motivation individuelle dans le « feu de l’action », l’habileté technique et le moment de l’utilisation. Il s’agit du préservatif masculine (condom), du préservatif féminin, du diaphragme, de la cape, de l’éponge, du spermicide, du retrait et de la sensibilisation à la fécondité. La contraception d’urgence (CU) est une autre méthode utilisée « près du moment » que toutes les adolescents devraient connaître, quel que soit leur choix de contraception. Cependant, elle devrait être utilisée comme méthode d’appoint plutôt que comme méthode primaire.

Les DdS devraient transmettre les messages clés suivants lorsqu’ils discutent avec les adolescentes :

1. Même si elles sont beaucoup moins efficaces que les CRLDA, les méthodes de la troisième catégorie sont préférables à l’absence de contraception.

2. La combinaison d’une méthode de la première ou de la deuxième catégorie avec une méthode de la troisième catégorie, ou l’utilisation de deux méthodes de la troisième catégorie réduisent considérablement les échecs contraceptifs. Par exemple, le taux d’échec d’une pilule contraceptive orale associée à un préservatif masculin équivaut au taux d’échec d’une pilule contraceptive orale (0,09) multiplié par le taux d’échec d’un préservatif masculin (0,18), soit 0,02 ou 2 %.

3. Pour assurer l’efficacité optimale de la contraception, il est essentiel de donner des conseils techniques sur la méthode retenue (p. ex., démontrer la technique sécuritaire pour retirer le préservatif; préciser clairement combien de temps après la relation sexuelle le diaphragme, la cape ou l’éponge doit demeurer en place).

4. Quelle que soit la méthode contraceptive retenue, il faut toujours encourager l’utilisation du préservatif pour réduire le risque d’ITS.

Le fait de recommander les CRLDA en première intention représente un important changement de pratique. Notamment, le DIU était fortement découragé chez les adolescentes, mais ces conseils découlaient d’une mauvaise interprétation des données disponibles [4]. Le caractère sécuritaire de la contraception intra-utérine chez les jeunes nullipares est avalisé par la Société des obstétriciens et gynécologues du Canada (SOGC) [5]. Les études démontrent qu’en l’absence d’obstacles financiers, de nombreuses adolescentes sont intéressées par les CRLDA, y compris les contraceptifs intra-utérins (CIU) [6]. Dans les populations où l’utilisation des CRLDA est élevée, l’incidence de grossesse à l’adolescence a considérablement diminué [7]. Depuis 2012, plusieurs organismes, y compris l’American Congress of Obstetricians and Gynecologists, l’American Academy of Pediatrics et la Society for Adolescent Health and Medicine, ont officiellement avalisé les CRLDA en première intention chez les adolescentes [8].

Le présent document de principes recommande l’utilisation des CRLDA en première intention pour les adolescentes canadiennes, tout en convenant que les CIU sont les seuls CRLDA offerts au Canada et que les adolescentes ne sont pas toutes à l’aise de les utiliser. Le fait d’adapter les discussions sur les choix de contraception aux préférences et aux besoins de chacune et de répondre respectueusement à toutes les préoccupations s’inscrit dans un processus décisionnel coopératif qui favorise l’observance. Il faut maintenir cette relation respectueuse même lorsque l’adolescente opte pour une méthode contraceptive moins efficace, telle que le retrait. La poursuite du dialogue à chaque rendez-vous permet de faire un suivi sur l’observance et les effets secondaires et donne l’occasion à l’adolescente d’opter pour une autre méthode. En revanche, les tentatives pour imposer une méthode donnée peuvent se solder par une observance plus faible.

Pour favoriser l’utilisation d’un CRLDA chez les adolescentes, les cliniciens qui n’insèrent pas de CIU doivent former un réseau de DdS prêts à offrir ce service. Lorsqu’un délai de plus de quelques jours est anticipé avant l’insertion, il est bon de recommander une méthode transitoire jusqu’à l’installation du dispositif, afin de réduire le risque de grossesse non planifiée pendant cette période.

Les DdS doivent également sensibiliser les adolescents de sexe masculin à la fertilité et à la contraception. Chaque rendez-vous doit inclure des questions ciblées et de l’information précise sur les méthodes contraceptives et leur efficacité (tableau 1), la promotion de l’utilisation du préservatif pour accroître la sécurité et l’efficacité des autres méthodes et prévenir les ITS et des conseils sur la CU en cas d’échec du préservatif ou de protection inadéquate. L’utilisation du préservatif incite les jeunes hommes à assumer la responsabilité de leur propre santé reproductive et à y jouer un rôle actif.

LA CONTRACEPTION HORMONALE À L’ADOLESCENCE

Des conseils détaillés sur la prescription de contraceptifs hormonaux dépassent la portée du présent document de principes. Cependant, la SOGC a publié un Consensus canadien sur la contraception très fouillé, qui passe en revue toutes les méthodes offertes sur le marché [5][9]–[11]. Les Critères de recevabilité médicale pour l’adoption et l’utilisation des méthodes contraceptives de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) [12] sont une excellente resource pour établir les méthodes contraceptives sécuritaires pour les personnes ayant des affections précises.

En raison du risque accru d’accident vasculaire cérébral, la migraine avec aura est une contre-indication absolue à la contraception à base d’œstrogènes (COC, timbre transdermique ou anneau vaginal) qui est souvent négligée. Les adolescents peuvent oublier de signaler ce problème. Il faut leur demander expressément si elles ont reçu un diagnostic de migraine avec aura et s’informer de la présence de symptômes compatibles avec ce diagnostic. Cependant, les bienfaits de la contraception hormonale sont généralement supérieurs aux risques qui s’y associent chez les adolescentes présentant des migraines sans aura ou d’autres phénomènes neurologiques. Les methods contraceptives avec progestatif seul peuvent être utilisées en présence des deux types de migraine.

Les contraceptifs hormonaux et la densité minérale osseuse

Cinquante pour cent de la masse osseuse à l’âge adulte est formée pendant l’adolescence [13]. La déminéralisation osseuse dépasse la minéralisation osseuse dès l’âge de 25 ans [14]. Ainsi, le recours à une méthode contraceptive qui peut réduire la minéralisation osseuse chez les femmes de moins de 25 ans peut compromettre leur santé osseuse à long terme. L’AMPR a fait l’objet d’études particulières, car l’état hypoœstrogénique qu’il induit est lié à une diminution de la minéralisation osseuse [15]. Certaines observations sont toutefois rassurantes : la diminution de la densité minérale osseuse (DMO) est plus élevée pendant la première année d’utilisation, puis ralentit par la suite, et selon des études de petite taille, une augmentation de rebond de la DMO se produit après l’arrêt de l’AMPR [16]. Lorsqu’on considère les effets potentiels de l’AMPR sur la DMO, il faut se rappeler que la grossesse provoque également une déminéralisation osseuse. La SOGC conseille aux DdS de prévoir l’AMPR dans leur arsenal, mais d’en soupeser les risques et les avantages auprès des patientes. L’organisme préconise d’avertir les adolescents qui choisissent cette méthode d’optimiser leur consommation de calcium et de vitamine D, de faire des exercices de mise en charge et de réduire leur consommation de cigarettes, de caféine et d’alcool pour maximiser leur santé osseuse [17].

Étant donné l’importance de la minéralisation osseuse, il est préférable de prescrire une pilule contraceptive qui contient de 30 à 35 μg d’éthinylestradiol (ÉE), parce que des doses inférieures à 30 μg peuvent s’associer à une moins bonne minéralisation osseuse à l’adolescence [18]. Il n’est pas démontré que les COC contenant 20 μg d’ÉE provoquent moins d’effets secondaires [19] ou comportent moins de risques (voir ci-dessous) que les pilules de 30 à 35 μg. Le timbre transdermique libère 20 μg d’ÉE par jour, mais sa pharmacocinétique est différente et l’exposition globale est supérieure à celle d’une pilule de 30 μg d’ÉE [20]. L’anneau intravaginal semble s’accompagner d’une exposition aux œstrogènes moins élevée qu’une pilule de 30 μg d’ÉE, mais son effet sur la DMO des adolescents n’a pas encore été évalué.

Les contraceptifs hormonaux, la thromboembolie et les accidents vasculaires cérébraux

Les contraceptifs à base d’œstrogènes accroissent le risque de thrombose. Les COC accroissent de deux à quatre fois [21] le risque de thromboembolie veineuse (TEV) et de 1,5 à deux fois le risque d’accident vasculaire cérébral (AVC) par rapport au risque des non-utilisateurs [22]. Le risque de TEV ou d’AVC n’est pas statistiquement différent entre les pilules contraceptives contenant 20 ou 30 μg d’ÉE [22][23]. Les données sur les COC contenant 10 μg d’ÉE ne sont pas encore disponibles. Les contraceptifs transdermiques et transvaginaux n’ont pas fait l’objet d’études aussi approfondies sur le risque de TEV. Au pire, ils peuvent doubler le taux de TEV par rapport aux COC [24]. Il est important de se rappeler que malgré le risque plus élevé de TEV et d’AVC associé aux COC, au départ le risque de ces événements est faible chez les jeunes de 15 à 19 ans (thrombose veineuse : de quatre à 11 cas sur 100 000 jeunes par année [25–27]; AVC : de trois à six cas sur 100 000 jeunes par année [28]). Par conséquent, le risque absolu de l’hormonothérapie est également faible [29].

Depuis dix ans, plusieurs études ont soulevé la possibilité que le risque de TEV (mais pas celui d’AVC) soit influencé par le type de progestatif utilisé dans les COC [21]. Le rôle des divers progestatifs dans le risque de TEV associé aux COC demeure controversé [30].

Les contraceptifs oraux et le poids corporel

Les adolescentes craignent particulièrement de prendre du poids lorsqu’elles prennent un contraceptif hormonal. Cependant, selon une analyse Cochrane, peu de données probantes indiquent une association constante entre l’utilisation de contraceptifs oraux ou transdermiques et la prise de poids [31]. Les données sur l’anneau vaginal [32] et les SIU [33] sont plus limitées, mais ne semblent pas signaler de lien avec la prise de poids. Il est important de préparer les jeunes à prendre du poids tout au long d’une adolescence normale et d’utiliser les courbes de croissance normales pour évaluer les modifications déclarées aux poids. Il y a des réponses idiosyncrasiques aux COC, qui s’associent parfois à une augmentation radicale déclarée de l’appétit et qui semblent liées aux progestatifs [34]. L’utilisation d’un autre progestatif peut régler le problème.

Selon de nombreuses études, l’utilisation de l’AMPR provoque une prise de poids. La monographie de produit fait état d’une augmentation moyenne de 2,5 kg pendant la première année et de 3,6 kg pendant les deux premières années [35]. Toutefois, la prise de poids n’est pas uniforme. En effet, de 20 % à 40 % des utilisatrices perdent du poids pendant qu’elles utilisent l’AMPR. Les adolescentes qui font de l’embonpoint sont beaucoup plus à risque de prendre du poids que les jeunes filles de leur âge qui n’en font pas [36], et une prise de poids précoce est indicatrices d’une prise de poids continue [37].

Certains contraceptifs peuvent perdre une certaine efficacité à des poids plus élevés. Par exemple, il est démontré que le timbre transdermique est moins efficace chez les femmes de plus de 90 kg. Il faudrait alors offrir une autre méthode contraceptive ou donner des conseils au sujet d’une méthode d’appoint.

Le choix d’un contraceptif hormonal par voie orale

La prescription d’un COC qui contient de 30 à 35 μg d’ÉE représente un bon point de départ. L’art de la prescription repose sur la capacité de changer de type de pilule contraceptive pour contrer les effets secondaires plutôt que de savoir quel produit est « parfait » dès le départ. Les effets secondaires diminuent souvent au bout de deux ou trois cycles d’utilisation. Il faut préparer les adolescentes à cette transition et éviter de changer de pilule trop rapidement, à moins que les effets secondaires (p. ex., fréquence des céphalées) augmentent au lieu de diminuer au fil du temps.

Une utilisation de longue durée

De nombreux COC sont présentés dans des emballages pour des cycles de 28 jours, contenant 21 comprimés actifs et sept placebos, mais des cycles beaucoup plus longs et même la prise de comprimés actifs sans discontinuer, sans intervalle de placebos, ne pose aucun problème de sécurité [38]. Pour obtenir un cycle plus long, il est possible d’utiliser seulement les comprimés actifs pendant au moins deux cycles, suivis de quatre à sept jours de placebo. Un DdS peut également prescrire des emballages « de longue durée », contenant 84 comprimés actifs suivis d’un intervalle sans hormone de sept jours ou suivis de sept jours de comprimés contenant 10 μg d’ÉE. Les jeunes femmes peuvent présenter des saignements intermenstruels après la prise de comprimés actifs pendant plusieurs semaines. Ce phénomène ne réduit pas l’efficacité de la pilule contraceptive, mais peut être un effet secondaire désagréable. Si elles continuent de prendre des comprimés actifs, les saignements finiront par arrêter. Si elles prennent des comprimés actifs pendant au moins 21 jours, elles peuvent arrêter d’en prendre de quatre à sept jours, puis commencer un nouvel emballage. Le timbre et l’anneau peuvent être utilisés de la même façon pour produire des cycles de longue durée.

L’ADOPTION D’UNE MÉTHODE CONTRACEPTIVE

Les stratégies suivantes réduisent les obstacles courants à l’adoption et au maintien d’une méthode contraceptive.

L'inutilité de l'examen gynécologique

Par le passé, la prescription de contraceptifs était liée à un examen gynécologique, au test Papanicolaou (ou « test Pap ») et au dépistage des ITS. Cependant, aucun de ces examens n’est nécessaire pour prescrire des contraceptifs (sauf dans le cas des SIU ou des DIU, où le dépistage des ITS doit être effectué au moment de l’insertion ou aux alentours de ce moment). En fait, le test Pap n’est plus recommandé chez les adolescentes [39]. Dans la plupart des cas, une anamnèse bien faite et la mesure de la tension artérielle suffisent. La vérification du poids au début de la contraception permet une évaluation objective des futures doléances en cas de prise de poids.

La recommandation de ne pas procéder à l’examen gynécologique ne vise pas à décourager le dépistage des ITS, qui peut maintenant être fait à partir de prélèvements effectués par la patiente, mais plutôt à s’assurer que les obstacles au dépistage soulevés par la patiente ou le DdS n’entravent pas l’accès aux contraceptifs.

Un démarrage rapide

Par le passé, les DdS conseillaient aux femmes de commencer à prendre leur contraceptif pendant leurs menstruations, pour s’assurer qu’elles n’étaient pas enceintes. Lorsque l’adolescente choisit une méthode qui l’oblige à retourner en milieu clinique pour amorcer la contraception, p. ex., un AMPR ou l’insertion d’un CIU, il faudra peut-être des mois avant de coordonner les disponibilités du DdS avec les siennes, et entre-temps, le risque de grossesse demeure [40]. Chez les adolescentes qui choisissent un COC et qui peuvent entreprendre leur contraception sans autre intervention d’un DdS, il est démontré que le fait de leur demander d’attendre leurs prochaines règles avant de commencer réduit la probabilité de passer à un deuxième emballage de pilules [41]. C’est pourquoi de nombreux DdS ont adopté la méthode de démarrage rapide. Une jeune femme qui n’en est pas dans les sept premiers jours suivant le début de ses menstruations (le point de départ habituel) subit un dépistage du risque de grossesse. Elle passe un test de grossesse, surtout si ses dernières règles étaient anormales ou qu’elle a eu des relations sexuelles non protégées depuis. Si le test est négatif, elle commence la contraception hormonale le jour même, par voie injectable ou orale. Un deuxième test de grossesse est recommandé 21 jours plus tard, pour s’assurer qu’elle n’est pas enceinte. L’utilisation de préservatifs d’appoint est préconisée pendant une période minimale de sept jours et de 14 jours si elle a reçu de l’ulipristal en CU, parce que l’ovulation est toujours possible dans les quelques jours suivant le début de la contraception [42]. Les COC, les PPS ou l’AMPR n’ont jamais eu d’effets tératogènes établis en début de grossesse.

Il est possible d’insérer le CIU en tout temps pendant le cycle menstruel pourvu d’être relativement certain que l’adolescente n’est pas enceinte. L’insertion d’un CIU peut compromettre une grossesse [5]. Le DIU au cuivre peut être inséré jusqu’à sept jours après un coït et représente alors une forme de CU plus efficace que celles administrées par voie orale [43].

Des prescriptions annuelles

Selon certaines données probantes, la remise d’une prescription de contraceptifs pour une période d’un an, même lorsque des suivis plus fréquents sont prévus, accroît le maintien de la méthode et réduit le nombre de tests de grossesse, de grossesses et d’avortements. De plus, la remise d’emballages de pilules contraceptives sur place favorise davantage le maintien de la contraception que la remise d’une prescription [44]. En revanche, les études de suivis étroits (p. ex., planification de nouveaux rendez-vous ou appels de suivi) n’ont pas démontré d’amélioration du maintien de la contraception chez les adolescentes [45].

En milieu clinique, où les contraceptifs sont remis directement aux adolescentes, on peut s’inquiéter des coûts engagés par le gaspillage de pilules. Ce gaspillage est plus élevé lorsqu’un plus grand nombre de pilules est distribué, mais il ne s’agit pas de pertes proportionnelles [46]. Les coûts liés au gaspillage sont négligeables par rapport aux coûts des soins de santé et aux coût sociaux combinés liés aux rendez-vous répétés, aux tests de grossesse, aux grossesses non planifiées, aux avortements et à la parentalité à l’adolescence.

CONSEILLER L’UTILISATION DE PRÉSERVATIFS

Des facteurs biologiques et sociaux rendent les adolescents à haut risque d’ITS. Même lorsqu’elles utilisent une contraception efficace, il est important de leur rappeler que seule l’utilisation du préservatif les empêche de contracter ou de propager des ITS. Il faut toujours rappeler aux jeunes qui utilisent seulement des préservatifs que la CU est envisageable en cas de fuite, de glissement ou de bris du préservatif.

RECOMMANDATIONS

Une seule grossesse non planifiée ou non désirée entraîne des coûts importants sur le plan personnel, social et médical. Les dispensateurs de soins doivent faciliter l’accès à la contraception et insister sur des pratiques protectrices plus sécuritaires pour toutes les adolescentes qui souhaitent éviter une grossesse. Tous les dispensateurs de soins des adolescentes devraient mettre les recommandations suivantes en pratique auprès des patientes et des familles qu’ils voient au quotidien.

1. Parler de santé sexuelle, de fertilité, de planification familiale et de contraception avec toutes les adolescentes dès le début de l’adolescence, de préférence avant les premières activités sexuelles. Dans la mesure du possible, poursuivre le dialogue après le passage aux soins pour adulte.

2. Adopter une approche coopérative au moment de parler des possibilités de contraception aux adolescentes afin d’optimiser l’observance. Soupeser l’efficacité, les risques, les effets secondaires et l’acceptabilité personnelle de chaque méthode auprès de chaque patiente.

3. Recommander les contraceptifs par ordre d’efficacité :

i. Contraceptifs réversibles à longue durée d’action (CRLDA), particulièrement le dispositif intra-utérin (DIU) ou les systèmes intra-utérins (SIU).

ii. Méthodes hormonales : contraceptifs oraux, timbre transdermique, anneau vaginal et contraceptifs injec-tables (p. ex., acétate de médroxyprogestérone-retard [AMPR]).

iii. Méthodes utilisées au moment des relations sexuelles : préservatifs pour homme et pour femme, diaphragmes, capes cervicales, éponges et spermicide.

Pour les patientes qui ne sont pas à l’aise avec les CRLDA, l’emploi d’une méthode hormonale associée à une méthode utilisée au moment des relations sexuelles est presque aussi efficace.

4. Fournir des prescriptions de contraceptifs sans examen gynécologique, à moins qu’il soit nécessaire (p. ex., en cas d’insertion de CIU). Pour la plupart des adolescentes, une anamnèse complète, de même que la vérification du poids et la mesure de la tension artérielle, suffisent. Le dépistage des infections transmises sexuellement doit être offert aux adolescentes actives sexuellement, mais ne devrait pas être nécessaire pour obtenir un contraceptif, sauf au moment d’insérer un CIU.

5. Dans la mesure du possible, suggérer une approche contraceptive à démarrage rapide plutôt que d’attendre les prochaines menstruations. Cette approche peut convener à toute méthode contraceptive, pourvu d’être relativement certain que la patiente n’est pas enceinte.

6. Dans le cas d’autres contraceptifs que les CRLDA, privilégier une prescription à long terme (12 mois) afin d’accroître l’observance, comme c’est le cas pour la remise d’emballages de pilules contraceptives sur place plutôt que de prescriptions.

7. Offrir des conseils techniques aux adolescentes au sujet des meilleures méthodes contraceptives (p. ex., meilleure technique pour retirer un préservatif). Encourager l’ajout du préservatif à toutes les autres méthodes contraceptives pour prévenir les infections transmises sexuellement.

8. Informer toutes les adolescentes des possibilités de contraception d’urgence (CU). Fait important, elles doivent comprendre que la CU est une méthode d’appoint, et non une méthode primaire de contrôle des naissances.

9. Consulter le Consensus canadien sur la contraception de la Société des obstétriciens et gynécologues du Canada et les Critères de recevabilité médicale pour l’adoption et l’utilisation continue de méthodes contraceptives de l'Organisation mondiale de la Santé pour étayer le choix de contraceptif. S’informer du diagnostic de migraines avec aura ou de symptômes compatibles avec ce diagnostic, car ce sont des contre-indications absolues à l’utilisation d’œstrogènes (contraceptifs oraux combinés, timbre, anneau vaginal).

10. Prôner l’acceptation de l’implant contraceptif sous-cutané au Canada.

Remerciements

Le comité de la pédiatrie communautaire de la Société canadienne de pédiatrie et des représentants de la Société des obstétriciens et gynécologues du Canada et du Collège des médecins de famille du Canada ont révisé le présent document de principes.


COMITÉ DE LA SANTÉ DE L’ADOLESCENT DE LA SCP

Membres : Giuseppina Di Meglio MD, Natasha Johnson MD, Margo Lane MD (présidente), Karen Leis MD (représentante du conseil), Mark Norris MD, Ellie Vyver MD; Elisabeth (Lisette) Yorke MD (membre résidente de la SCP); Johanne Harvey MD (membre sortante); Gillian Thompson IP en pédiatrie (membre sortante)

Représentante : Megan Harrison MD, section de la santé de l’adolescent de la SCP

Auteures principales : Giuseppina Di Meglio MD, Colleen Crowther MD, Joanne Simms IP (retraitée)


Références

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Avertissement : Les recommandations du présent document de principes ne constituent pas une démarche ou un mode de traitement exclusif. Des variations tenant compte de la situation du patient peuvent se révéler pertinentes. Les adresses Internet sont à jour au moment de la publication.

Mise à jour : le 30 mai 2024